Alors que le groupe s'était séparé deux ans plus tôt, notamment après le départ de Steve Howe et Geoff Down lassés par les incessants changements de line up du groupe et peut-être aussi par les critiques anglaises qui reprochaient à Trevor Horn de ne pas égaler Jon Anderson au chant. Tout semblait donc indiquer que le groupe était mort et la compilation «Classic Yes » s'imposait comme le dernier album du groupe. Pourtant courant 83, Atlantic Record annonce la sortie imminente d'un nouvel opus avec rien de moins que 4 membres fondateurs et Trevor Horn à la production.
Tel le Phoenix, Yes renaît de ses cendres, du moins se réinvente un son et un image. Terminé les morceaux de 20 minutes et les mises en scènes grandiloquentes. Le groupe sous l'influence du sud-africain Trevor Rabbin s'oriente vers un son plus radical et des compositions plus musclées. Le punk est passé par là ! Contre toute attente, ce changement de direction fut à la fois salué par la critique et acclamé par les fans.
Mieux encore, il attire de nouveaux auditeurs notamment grâce au single « Owner of a Lonely Heart » - seul titre du groupe a avoir été numéro 1 sur tous les charts de la planète, considéré comme un classique du rock moderne. On pourrait croire en lisant ces lignes que Yes a vendu son âme avec cet album : il n'en est rien. En abandonnant les architectures complexes de Wakeman et les arpèges de Steve Howe pour des morceaux plus carrés, le groupe n'a pas pour autant oublié ce qui a fait son succès, des textes oscillant entre le rêve et la réalité, un équilibre parfait entre les harmonies vocales d'Anderson/Rabbin et la basse de Chris Squire, la batterie d'Alan White, les synthétiseurs de Tony Kaye et la guitar du sud africain. Peut être moins progressif que ses prédécesseurs - encore que « Hearts » reste un modèle du genre - l'album sonne très rock, voire même Hard FM. La voie du prog sera retrouvée avec l'album suivant « BIG GENERATOR ».
Véritable succès commercial et musical, « 90125 » (le titre provient du numéro de série d'Atlantic) s'impose comme l'album de la première renaissance du groupe au début des années 80.
Ps : Il est intéressant de remarquer que tous les groupes de prog phare des années 70 connaissent une véritable mutation au début de la décennie suivante :comme on vient de le voir Yes change de son, Genesis s'oriente vers la pop chic alors que d'autres formations disparaissent (Van der Graff, King Crimson). Paradoxalement au même moment des « petits » groupes anglais font leur apparition sur la scène progressive (Marillion, Pendragon, ou encore IQ par exemple)