Alors qu'il tentait de capitaliser sur le succès de "Vital Signs" (1984) en utilisant la même recette, "When Seconds Count" (1986) a été loin de rencontrer un succès équivalent. Devant cet échec relatif, l'unité du groupe s'est retrouvée lézardée en enregistrant le départ des membres de sa section rythmique. Et si le départ de Stephan Ellis (basse) est dû à des problèmes de santé, c'est bien un désaccord artistique qui a poussé Marc Droubay (batterie) à partir, ce dernier n'approuvant pas l'orientation AOR aux dépens d'un hard rock, certes mélodique, mais plus énergique. Pour compenser ces défections, le trio restant se tourne vers des musiciens qui apparaissent seulement comme invités, à savoir le bassiste Bill Syniar (Chicago) et le batteur Mickey Curry (Bryan Adams et Hall & Oates).
Sous la double influence du choc dû aux départs de Ellis et Droubay et de la pression causée par la baisse de notoriété, Jimi Jamison, Frankie Sullivan et Jim Peterik semblent un brin désorientés et hésitent entre deux voies sans réellement choisir. Ils tentent clairement un retour aux sources avec des titres plus musclés sur lesquels le chant de Jami Jamison fait merveille en distillant une agressivité qu'on ne lui connaissait plus depuis son passage au sein de Cobra. 'She's A Star' ouvre les hostilités avec un son plus abrupt, un riff et un refrain directs et un solo étincelant. Car l'autre bénéficiaire des changements enregistrés sur ce "Too Hot To Sleep" est bien un Frankie Sullivan qui reprend régulièrement l'ascendant sur les claviers qui régnaient en maîtres depuis deux opus. Ses soli peuvent enfin s'épanouir et apportent une luminosité supplémentaire à un titre éponyme alternant refrain catchy et couplets plus calmes, ou aux ambitieux 'Rhythm Of The City' et 'Here Comes Desire' trônant en milieu d'opus du haut de leur puissance.
Cependant, sans qu'il soit possible de savoir si la raison est à chercher vers la peur d'un échec commercial ou vers l'influence toujours importante de Jim Peterik, la face AOR reprend régulièrement le dessus, provoquant une alternance d'ambiances qui finit par nuire à la cohérence de l'ensemble. Pourtant, le classique 'Desperate Dreams' aux claviers prégnants, ou le single 'Didn't Know It Was Love' plus équilibré et au refrain hyper accrocheur, se révèlent de véritables hits en puissance. L'enthousiasme provoqué par 'Tell Me I'm The One' ou le plus rapide 'Can't Give It Up' ne peut être remis en question, tout comme l'émotion déclenchée par la délicate ballade aérienne 'Across The Miles' qui sera le seul titre à obtenir un réel succès sur les ondes FM US. À chaque fois, la qualité d'interprétation et de composition est évidente, mais l'hésitation entre deux voies artistiques ne permet pas à l'auditeur de se laisser totalement emporter.
Si le majestueux et puissant 'Burning Bridges' clôture cet opus sur une note de puissance avec un solo tout en finesse, il ne parvient pas à effacer ce sentiment d'indécision qui flotte tout au long de 10 titres d'une qualité pourtant supérieure. Il serait cependant injuste d'ignorer ce "Too Hot To Sleep" qui restera longtemps comme le dernier album du groupe de Chicago. Le succès ne sera pas au rendez-vous, d'autant que l'époque n'était alors pas tendre avec le rock mélodique en général. Jim Peterik et Frankie Sullivan décidèrent de mettre le groupe en veille pendant que Jimi Jamison tenta de continuer à tourner avec d'autres musiciens tout en gardant le nom de la formation, ce qui déboucha sur des querelles judiciaires ne rendant pas au groupe l'hommage qu'il mérite pour l'ensemble de son œuvre.