Il y a 10 mois paraissait "Heal My Soul", album posthume d'inédits de Jeff Healey qui venait rappeler le génie de cet artiste trop tôt disparu. La qualité de cet opus ayant déclenché une vague d'enthousiasme, Mascot bat le fer tant qu'il est chaud et prolonge l'hommage à l'artiste qui aurait dû fêter ses 50 ans. "Holding On : A Heal My Soul Companion" est présenté comme un complément de son prédécesseur et propose deux parties distinctes. La première comporte 5 titres studio inédits enregistrés à la même période que ceux figurant sur "Heal My Soul", et la seconde est un live donné à Oslo (Norvège) en 1999.
Sans que l'on connaisse les raisons qui ont pu justifier leur mise à l'écart de "Heal My Soul", les morceaux ouvrant ce nouvel hommage à Jeff Healey, viennent démontrer qu'ils auraient largement eu leur place sur l'opus paru en 2016. Que ce soit le riff obsédant d'un 'Love Takes Time' flirtant avec le hard-rock, un 'Every Other Guy' aux accents de blues britannique, le funk-rock de 'Dancing With The Monsters' ou un 'All That I Believe' réussissant l'inhabituel mariage de la mélancolie et de l'énergie, il n'y a rien à jeter. Les soli sont toujours aussi lumineux et le court 'CNIBlues' vient clôturer cette première partie avec son blues acoustique digne de l'école de Chicago et dont le seul défaut est de ne pas dépasser la durée d'une minute.
C'est par un "Ladies and gentlemen, The Jeff Healey Band" annoncé par le speaker des lieux qu'est lancée la partie live enregistrée en Norvège. Une fois de plus, le Canadien et ses acolytes vont apporter une démonstration de leur authenticité et de leur facilité à magnétiser une assistance. Le trio, renforcé par Pat Rush en seconde guitare pour l'occasion, alterne les reprises et les compositions et couvre un large panel du blues tel qu'il a l'habitude de le pratiquer. 'How Blues Can You Get', reprise de BB King, et 'Yer Blues' des Beatles en représentent probablement la face la plus traditionnelle. Le feeling transpire de chaque note du premier sur lequel Jeff Healey s'amuse même à copier le style de l'auteur dans son jeu de guitare avant de s'orienter vers une approche plus comparable à Jimi Hendrix. Sur 'Yer Blues', déjà présent sur "Cover To Cover" (1995), le final se fait incandescent en multipliant les soli de haut niveau. 'My Little Girl' et 'I Can't Get My Hands On You' proposent quant à eux le visage le plus hard-rock du guitariste. Bien qu'une fois de plus, chaque titre mérite que l'on s'y attarde, nous citerons cependant la reprise du 'Stuck In The Middle With You' de Stealers Wheel, qui se retrouve affublé d'une introduction digne des Rolling Stones alors qu'une improvisation de 'Tequila' vient enrichir son final car Jeff a soi-disant oublié quel était le prochain titre à jouer. À noter également deux titres inédits à l'époque et qui se retrouveront sur l'album "Get Me Some" (2000) : la délicate ballade 'Macon Georgia Blue' qui hypnotise le public, et un 'Holding On' qui multiplie les soli et à la fin duquel Jeff annonce que le groupe découvre pour la première fois ce titre avec le public. Enfin, 'See The Light' vient conclure le tout sur presque 9 minutes avec une jam centrale, prétexte à la présentation des musiciens.
Une fois de plus, cet album mettra tous les fans de Jeff Healey d'accord, ainsi que tous les amateurs de blues rock de grande qualité. Il était pourtant tentant de craindre une nouvelle opération mercantile profitant d'un anniversaire posthume de l'artiste. Même si ce doute ne peut pas être totalement écarté, une demi-douzaine de disques étant déjà sortie depuis son décès, il n'empêche que la qualité est toujours au rendez-vous et, qu'une fois encore, c'est le talent qui l'emporte face aux craintes. Et puis, l'équipe de production participant régulièrement à la lutte contre le cancer, il n'y a finalement aucune excuse à ne pas se procurer une œuvre qui se révèle à nouveau indispensable.