Près de cinq ans après son précédent album, le groupe finlandais Paidarion est sorti de son silence pour réaliser "Two Worlds Encounter" entouré d'une pléiade d'invités dont Robert Webb (de l'éphémère et sous-estimé England) au chant et aux claviers, la chanteuse américaine Jenny Darren, ou encore le guitariste hongrois Ákos Bogáti-Bokor (Yesterday). Ce titre d´album, somme toute assez banal, serait-il une profession de foi de la part de ce groupe adepte de crossover?
Le rock progressif de Paidarion est assez old school et les références à Pink Floyd, Camel ('Jungle Fever'), Steve Hackett abondent ('Cloudberry Sky'). Si les titres les plus progressifs se révèlent plutôt atmosphériques, ces derniers n'ont guère de chose à mettre en valeur, à l'image d'un 'Horseman To Symphinity', un peu répétitif, trop plaqué sur Camel et qui aurait mérité un meilleur interprète que Kev Moore. Donc, question progressif, rien de nouveau sous l'aurore boréale. Malgré la présence d'un vétéran du prog, le groupe peine à ajouter sa pierre à l'édifice.
C'est par sa dimension folk que le groupe est capable du meilleur. Au travers de belles ballades folk, nous sommes invités à découvrir des paysages embrumés ('Yellow') ou mystérieux (saurez-vous résister au chant poignant allié à la grâce des synthétiseurs sur 'Fragile Bridge' ?). Si les voix masculines sont banales (à l'exception de la sautillante 'Why Oh Why', Robert Webb n'est pas à son mieux), celle de la chanteuse Jenny Darren tire son épingle du jeu, par sa puissance soul. Masquant son jeu en se plaçant dans la lignée d'une Sonja Kristina, sa tessiture se révèle soudain plus large, par exemple lorsqu'elle se métamorphose en Janis Joplin sur la reprise du tube de Bobbie Gentry 'Ode to Billy Jo', marquée par ses claviers psychédéliques, lorsqu'elle s'envole ('Colin and Wendy' et surtout le sommet de l'album : 'Billy Would Climb'), parvenant parfois à se livrer à une bluffante (ou involontaire) imitation de Jon Anderson sur 'Fragile Bridge'.
"Two Worlds Encounter" se présente comme une agréable balade à la croisée des mondes (Europe pour le rock progressif et la musique noire américaine, ou par l'apport de chacun des invités), mais surtout à la croisée des hasards. Le groupe, en infériorité face aux invités, semble ignorer la direction à saisir. La devise de l'abbaye de Thélème, écrite par François Rabelais était l'injonction: "Fais ce que voudras". En ce qui concerne cet album, il aurait fallu ajouter "Mais pourvu que ça ait du sens !''.