Avant d’être un magnifique album, "Here Comes The Sun" devait être un projet annexe et acoustique des membres de Klone. En sortant un album acoustique, Klone réalise une envie en germe depuis longtemps et qui ne demandait qu'à être assouvie. L'élément déclencheur viendra du tourneur de Klone qui sollicita les Poitevins sur deux premières parties de concerts d'Anneke Van Giersbergen. En deux mois le set était calé et l'idée d'immortaliser l'expérience tranchée. C'est dans les conditions live mais sans public que "Unplugged" a été enregistré, dans le magnifique théâtre de La Coupe d'Or à Rochefort.
Par sa tonalité apaisante et atmosphérique et le fait qu'il ait été composé sur guitare acoustique, "Here Comes The Sun" est l'album de Klone qui est le plus logiquement transposable en version acoustique, ce n'est donc pas un hasard si celui-ci nourrit le plus "Unplugged". Si les compositions de "Here Comes The Sun" pouvaient encore se parer d'un voile léger fait de textures et d'atmosphères brumeuses, ici la mise à nu est totale et l'accomplissement de la démarche radicale initiale, en termes de pureté et de sensibilité, est atteint. Et justement, en réduisant les interprétations à une simple restitution des trames mélodiques des morceaux originaux, sans rythmique ni artifice, les adaptations perdent une partie de leurs attraits liés aux arrangements originaux et procurent une homogénéité, parfois synonyme de linéarité, intrinsèque à ce genre d'entreprise. Seul un accordéon, joué par Armelle Doucet, apporte les nuances et les agréments pour donner un supplément harmonique. Les qualités de chanteur de Yann Ligner se révèlent dans cet exercice difficile et périlleux, au point qu'il porte littéralement et avec splendeur toute la charge émotionnelle des chansons de "Unplugged", d'autant plus qu'il n'est aidé d'aucun chœur.
Paradoxalement, l'expérience montre que les plus grandes réussites dans ce genre d'albums se font quand le contraste entre la tonalité d'origine et la version revisitée est le plus saillant, le passage à la finesse et la pureté des instruments acoustiques révélant les subtilités parfois étouffées par la puissance de la saturation. On pense notamment à Pain Of Salvation et son excellent "12:5" ou encore les mythiques "Unplugged" de MTV (Nirvana, Alice In Chains, Korn). Confirmant cet axiome, ce sont les deux titres issus de "The Dreamer's Hideaway", 'Into The Void' et 'Rocket Smoke', qui emballent l'écoute et sortent du lot. Klone parvient à restituer subtilement l'énergie et la tension de ces deux forts moments de "The Dreamer's Hideaway" tout en leur donnant une saveur et un charme nouveaux enrichis de la chaleur naturelle des guitares acoustiques. Pour ce type de réalisation le choix de la sonorisation est particulièrement important et l'idée du magnifique théâtre du XVIIIe de Rochefort est en ce sens pertinente par les qualités phoniques de l'édifice qui apportent rondeur et profondeur à l'enregistrement. Une captation vidéo aurait été encore un plus pour profiter des atouts esthétiques des lieux et le projet est inscrit dans l'agenda de Klone d'après les dernières informations.
Il faut prendre ce "Unplugged" plus comme un retour aux sources de l'aventure "Here Comes The Sun" que comme un album de relecture de titres d'un répertoire. Tout en saluant les qualités de l'initiative, on peut légitimement regretter, eu égard à la réussite des adaptations des deux titres metal de "The Dreamer's Hideaway", que d'autres albums n'aient pas été plus mis en avant. Mais cela n'empêche pas le plaisir d'écoute de ce "Unplugged" qui exprime toute la sensibilité et la générosité dont sont porteurs les musiciens de Klone.