Après un premier essai en solo suivant ses départs de Pallas et Abel Ganz, Alan Reed revient en 2017 avec un deuxième effort en son nom propre, toujours accompagné de ses deux compères Scott Higham et Mike Stobbie, auxquels se sont joints quelques illustres invités (Steve Hackett, Christina Booth) et d'autres bien connus des aficionados de Music Waves (Claude Léonetti - Lazuli, Laetitia Chaudemanche – Weend'o et Monique Van der Kolk – Harvest).
Si d'aucuns avaient pu émettre des doutes sur la capacité d'Alan Reed à s'imposer seul, tant ses prestations au sein de Pallas ont parfois été décriées par certains, les 42 minutes présentes sur ce nouvel album s'avèrent bien loin de son titre. Plus que "Sur le Fil du Rasoir", c'est avec une étonnante sérénité que le chanteur également titulaire à la guitare et à la basse nous dévoile son néo-progressif directement hérité des années 80-90. Bien évidemment, difficile de ne pas reconnaître les influences de Pallas derrière la superbe ouverture proposée par 'My Sunlit Room', avec ses claviers typiquement néo et sa rythmique impaire, sur lesquels la voix légèrement voilée d'Alan Reed vient poser son timbre caractéristique, tandis que les guitares déchirent l'atmosphère.
Mais rapidement, c'est plutôt vers Fish que le propos musical va s'orienter, que ce soit dans un titre punchy comme 'Razor' (on a même droit à son fameux 'Shout' expressif), dont l'atmosphère inquiétante est magnifiquement renforcée par la Léode, ou bien dans la ballade acoustique 'Leaving'. Mariant à merveille les sonorités acoustiques (piano, guitare sèche) et électriques, ces dernières conviant régulièrement une guitare évoquant celle de Mirek Gil au sein de Collage, Alan Reed nous délivre des mélodies passionnantes et variées, simples d'accès mais pas simplistes.
Et quand le chant s'arrête, les musiciens s'ingénient à nous délivrer quelques petites merveilles instrumentales, certes pas très longues eu égard à la courte durée des différentes plages, mais reprenant avec bonheur rythmiques impaires et ritournelles entêtantes. La meilleure démonstration de cette tendance est à découvrir dans 'Northern Light' qui, après une première partie qui friserait le chant de Noël si le chant féminin n'y apportait pas une certaine classe, nous envoie sur la planète des rythmiques alambiquées portées par un Scott Higham impressionnant et des variations autour d'une ritournelle toute simple mais captivante.
Pour tous ceux que l'évolution par trop métallique de Pallas dans les années 2000 a pu rebuter, Alan Reed offre une magnifique session de rattrapage, sorte de retour vers un passé pas si lointain, celui qui a vu le néo-prog permettre au progressif dans son ensemble de reprendre pied. Primauté de la mélodie sur la technique sans que celle-ci ne soit absente, variété des arrangements et des sonorités, accessibilité permanente, "Honey on the Razor's Edge" frise le sans-faute et possède tous les arguments pour enthousiasmer le plus grand nombre.