S’il est âgé de seulement 20 ans quand sort son premier album éponyme, Bryan Adams est cependant loin d’être un nouveau venu dans le milieu du rock canadien. Depuis l’âge de 15 ans, il chante dans le groupe de glam Sweeney Todd, qu’il quitte deux ans plus tard. C’est en 1978 qu’il rencontre Jim Vallance, producteur et multi-instrumentiste avec qui il enregistre rapidement plusieurs titres. Il arrose les maisons de disques locales de démos et le duo finit par signer chez A&M pour sortir cet opus en 1980 sous le nom du chanteur qui tient également la guitare et le piano.
S’il n’a rien de révolutionnaire en soi, cet album a déjà le mérite d’être parfaitement ancré dans son époque de sortie avec une ribambelle de titres fleurant bon le rock mélodique des années 80. On pense même à certaines icônes de l’AOR du moment, comme sur l’imparable ‘Win Some Lose Some’, un des sommets de ce premier jet discographique avec sa rythmique légèrement hard-rock aux accents dignes de Foreigner, ou sur le léger et accrocheur ‘State Of Mind’ au rythme de valse à trois temps et à l’AOR aux effluves remémorant Toto. Mais c’est surtout la voix légèrement éraillée du maître des lieux qui marque déjà les esprits, délicat alliage de puissance et de chaleur.
Les approches les plus en douceur ne s’éloignent pas du domaine du gentillet (‘Give Me Your Love’, ‘Don’t Ya Say It’) et quelques titres semblent trop calibrés et manquent encore de véritable personnalité (‘Hidin’ From Love’, ‘Wait And See’). Par contre, quand le Canadien et son compère injectent une bonne dose d’énergie, le résultat devient déjà très intéressant et accrocheur (‘Win Some Lose Some’, ‘Wastin’ Time’ et ‘Remember’). Quant au mid-tempo final ‘Try To See It My Way’, il prouve que la puissance n’a rien à voir avec le tempo.
Premier œuvre à l’intérêt essentiellement historique, "Bryan Adams" révèle néanmoins un potentiel hors norme pour un artiste qui impose déjà une voix unique ainsi qu’un sens de la mélodie et de la composition très supérieur à ceux de la plupart des artistes de son âge. Pour l’apprécier à sa juste valeur, cet opus doit être replacé dans son contexte historique et ne pas être l’objet de trop grandes exigences.