Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis la sortie du 6ème album studio de Magenta, "The Twenty Seven Club". Outre la maladie qui a touché Christina Booth, les membres du groupe se sont plongés dans des projets annexes : hommages oldfieldien pour Rob Reed (2 volumes de "Sanctuary", production de l'album de Les Penning), nouvel album solo pour Christina, celle-ci participant également à la tournée "Masquerade 20" en tant que choriste pour Pendragon. C'est donc avec une certaine fraîcheur d'esprit que le groupe a remis le couvert, complété par Jon Griffiths derrière les fûts et Dan Nelson à la basse.
Avec seulement trois titres au compteur, "We Are Legend" se propose de nous emmener dans un univers conceptuel post-apocalypse, probablement en référence au célèbre film du quasi-même nom de Francis Lawrence, "I Am Legend". Magenta, les derniers survivants du prog ???
Toujours est-il que les 26 minutes percutantes de 'Trojan' vont très vite plonger l'auditeur dans le vif du sujet. Mêlant le meilleur de "Revolutions" et "Seven", ce titre epique est magnifiquement porté par une batterie vigoureuse et inspirée, avec notamment de superbes syncopes dans les chorus initiaux et finaux. Les nombreux thèmes s'enchaînent de manière très naturelle, tous plus inspirés les uns que les autres, avec un équilibre judicieux entre parties instrumentales et chantées, ces dernières étant comme d'habitude magnifiquement servies par une Christina au mieux de sa forme.
Le son est énorme, notamment dans les chorus symphoniques desquels se dégage la guitare solo, accompagnée par une basse chantante. L'écoute de celle-ci est d'ailleurs un vrai bonheur à elle seule, peu de groupes pouvant se targuer de ne pas considérer cet instrument comme un simple marqueur rythmique, d'autant que la production aux petits oignons permet d'en distinguer toutes les nuances.
Après un tel pavé, les deux autres titres s'avèrent plus compliqués à aborder. La cohérence des différentes sections de 'Colours' est de prime abord peu évidente. On y trouve ainsi une partie carrément floydienne, tout droite sortie de 'Shine on You Crazy Diamond', posée au milieu des sonorités et thèmes traditionnels de Magenta. L'effet est quelque peu bizarre, surtout lorsque le groupe revient à l'issue de cette section à son thème initial. Quant à 'Legend', il s'agit d'un morceau complexe, comprenant de nombreuses ruptures de thèmes, d'intensité, et proposant de surcroit certaines harmonies dissonantes peu évidentes à aborder après l'extrême fluidité proposée par la véritable symphonie progressive posée en ouverture de l'album.
S'ajoutant à la déjà très riche discographie de Magenta, "We Are Legend" s'y insère dans la continuité des opus précédents. Sans révolutionner le style du groupe tout en y apportant quelques légères évolutions, cette nouvelle production conforte la place en haut du panier de la bande à Rob Reed, celui-ci évitant habilement la redite tout en conservant cette coloration si singulière qui rend attachant et attractif chaque nouvel effort discographique.