Un simple coup d'œil sur la pochette habillant "Earthen" où figure un parc d'attraction abandonné au milieu d'une nature qui a repris ses droits suffit à comprendre que la plus petite trace d'espoir, la moindre trace de vie ont été depuis longtemps éconduites de l'univers que brossent ces Finlandais avec des pinceaux pesants et néanmoins aériens.
Troisième et dernier côté d'une trilogie débutée en 2013 avec "Kingdom" et poursuivie deux ans plus tard avec "Sunless", ce nouvel opus reste fidèle à une signature extrêmement personnelle qui, pour ceux qui ne la connaîtraient pas encore, allie la noirceur épaisse d'un death metal évolutif à la beauté stratosphérique d'un post metal puissant. Mais plus les années passent, plus le groupe tend à étirer ses compositions, évolution qui aboutit aujourd'hui à cette architecture démesurée longue de plus de vingt minutes sur laquelle reposent les deux parties de canevas massif aux allures de bloc enraciné dans une terre alourdie par le froid de l'hiver.
Corollaire de ce format à la fois dilaté et terrassant, la défloration de "Earthen" ne se fait pas sans mal car, et même si l'habileté des Finlandais à tricoter un maillage quasi progressif n'est plus à démontrer, la durée excessive de ces deux pistes impose une écoute attentive, sans laquelle l'album pourra sembler hermétique. La voix caverneuse et bourrue de Eero Haula ne facilite pas une immersion heureusement timidement éclairée par les nombreuses percées atmosphériques qui viennent miter la trame terreuse de 'A Storm Sermon' et plus encore 'In Amidst The Silent Thrones' dont les dernières minutes, nimbées d'un chant clair salvateur, vibre d'un éclat déchirant. Ourlées d'une fragile mélancolie, les guitares décollent alors très haut, érigeant un mausolée gonflée d'une tristesse infinie, prouvant en cela que Oceanwake réussit mieux dans le registre émotionnel du post doom que dans celui du death aux tubulures compliquées dont la combinaison des deux crée toutefois cette identité très particulière.
Reste que l'opus, s'il impressionne et ne saurait susciter une quelconque réserve quant à son exécution, peine à émouvoir, sauf donc durant la lente élévation qui lui sert de conclusion ou au détour de certains passages plus lumineux. Il n'en demeure cependant pas moins que, peintres de paysages d'une froideur désolée, les Finlandais possèdent cette faculté unique de faire suinter de leur art des ambiances puissamment hantées...