Karfagen est l´un des vaisseaux spatiaux du guitariste ukrainien Anthony Kalugin, au même titre que Sunchild. Mais si le précédent cité manque cruellement d´intérêt, Karfagen qui tire son nom de la cité antique de Didon, Carthage, est également placé sous le signe du rock progressif old school. Pour son huitième album solo, le guitariste ukrainien décide ni plus ni moins de nous faire redécouvrir les mythes grecs à la sauce futuriste.
Karfagen garnit sa machine à remonter le temps d'instruments qui appartiennent à la mythologie du rock progressif : mellotron, clavecin, flûte et même accordéon. Les influences de Pink Floyd et de Yes semblent à première vue être digérées et ne se montrent pas aussi envahissantes que naguère. Des atmosphères éthérées et planantes du titre éponyme à la ballade lumineuse de 'Troy' qui se transforme en rapides, en passant par 'Celebration' marqué par son mellotron et ses claviers autour desquels le guitariste ukrainien nous offre une jolie partition de guitare, le voyage apparaît placé sous les meilleurs auspices. En outre, l'enchaînement schizophrène entre 'Zeus' avec son accordéon et ses claviers vintage et 'Dionis', qui laisse le champ libre à un trépidant solo de batterie et de somptueux passages à la guitare acoustique et à l'accordéon, se révèle un spectacle de foudre et de lumière ! L'accordéon, instrument trop malheureusement confiné dans les clichés de la java, fête ici son heure de gloire, avec un entraînant 'Dios Pyros.'
Malheureusement, comme à son habitude, Anthony Kalugin n'arrive toujours pas à réaliser un chef-d'œuvre digne de ce nom. Malgré toutes les qualités susdites, l'album traîne en longueur. Sur plus d'une heure de musique quasi instrumentale proposée, une bonne partie de la seconde moitié s'avère redondante et certaines pistes font doublon ('Aurora', de bonne qualité, rappelle les précédents morceaux) quand elles ne se distinguent pas par leur caractère artificiel : 'Transaleatorica 2' tient plus de l'assemblage, tandis que 'Homonymous' nous rappelle ce que pouvait faire un Steve Howe, s'il n'avait eu d'âme, et 'Natural Charm' s'inspire trop fortement de Focus. L'enchaînement de pistes courtes à des pistes longues nous fait immanquablement décrocher et l'on pourrait regretter l'absence d'une longue suite plutôt que des poussières d'étoiles. Enfin, que dire de 'Terra Incognita', le seul morceau de cette ode à la mythologie grecque chanté en... latin, et encore du latin de maternelle, qui ne plaide guère en faveur de ses interprètes !
Avec son ''Spektra'', Anthony Kalugin, malgré un problème de longueur et un choix discutable d'enchaînements des pistes purement instrumentales, réussit mieux que d'habitude à nous intéresser, en brodant autour d'un concept cependant vague, une véritable ode au rock progressif tout autant qu'aux instruments. Il est dommage que l'artiste n'ait pas de patte personnelle et se doive de passer toujours à travers le spectre du rock progressif old school.