Bjorn Riis est le membre fondateur du groupe norvégien Airbag. Grand admirateur de David Gilmour (il a d'ailleurs ouvert une page Facebook dédiée à cette admiration), le guitariste et chanteur sort en cette première moitié d'année son second album, "Forever Comes To An End". Après une première incartade en solitaire nommée "Lullabies In A Car Crash" très réussie, bien que trop proche de son groupe d'origine, Bjorn s'est remis au travail en abordant un thème sombre : celui de la rupture sentimentale, propice à transmettre autant d'émotions qu'une telle situation peut revêtir.
Ainsi, l'album passe au crible les différents stades psychologiques des séparés. D'abord la colère et déjà les regrets semblent ouvrir les hostilités avec une guitare rugueuse au riff rageur proche d'un Black Sabbath que d'ailleurs le Norvégien cite parmi ses inspirations. L'ambiance d'emblée tendue et dramatique illustre une rupture qui devient inéluctable. Ce sentiment évolue musicalement vers des atmosphères relativement apaisées, presque plaintives, comme une supplique désespérée entre les protagonistes, pour essayer de se donner une seconde chance qui au final n'arrivera pas, comme le laisse entendre le nom du titre : 'Forever Comes To An End' (l'éternité arrive à son terme) dont la conclusion donne l'occasion pour Bjorn de proposer un solo dont il a le secret : frissons garantis. Après ce début dantesque, dans lequel le talentueux musicien sort quelque peu de sa zone de confort, le piano prend le relais et témoigne de l''Absence' et ce vide ressenti après cette séparation que quelques notes de guitare viendront densifier. Le tout est parachevé par le souffle du vent, symbole de solitude.
Plus proche des travaux précédents, 'The Waves' décrit le vague à l'âme des personnages entre guitare acoustique sur laquelle se greffent les errances électriques et mélancoliques de la Stratocaster. Vient ensuite le temps de la fuite, courir pour se créer l'illusion de ne plus souffrir, avec 'Getaway' titre instrumental surprenant formé d'une boucle aux claviers sur laquelle Bjorn s'amuse à laisser libre cours à son imagination dans une ambiance proche de Porcupine Tree. Prenant le relais de ce cheminement dans lequel, dans cette situation, chacun peut se retrouver, 'Winter' calme le jeu par une introspection soutenue par le joli timbre de voix de Sichelle Mcmeo Aksum. Cette chanson imagine un dialogue dans lequel les séparés s'interrogent intérieurement, regrettent peut être, imaginent ce qu'il en aurait été si ils avaient agi différemment, le tout secoué par les tumultes sous forme de riffs plus agressifs. 'Where Are You Now', titre au nom évocateur, conclut de manière mélancolique cet album à fleur de peau où la guitare constitue le prolongement des larmes du musicien face à cette séparation souvent difficilement acceptée.
L'ensemble est d'une très belle cohérence et moins démonstratif que peuvent l'être les interventions solistes de Bjorn dans Airbag. Ici, le concept prend le pas sur le guitar hero et chaque instrument apporte sa pierre à l'édifice, aidé en ce sens par les membres du combo originel dont il est issu (Henrick Fossum à la batterie et Asle Tostrup à la programmation) et par Simen Valldal Johannessen (du gorupe Oak) au piano, qui prend une plus grande place et apporte une touche de nostalgie et de tristesse.
Plus varié que son précédent album, toujours aussi désenchanté et fataliste, "Forever Comes To An End" n'est pas conseillé aux dépressifs. Sensible et touchant, retranscrivant les étapes d'une rupture amoureuse dont il serait la caméra, il sonde l'âme. L'album est l'une des belles réussites de cette année.