On ne présente plus Leif Edling, fondateur et bassiste de Candlemass, intronisé depuis la renaissance du genre tant commerciale que critique, à l'aube des années 2000, comme The master of doom. Ses lignes de basse telluriques sont entrées dans la légende et son écriture, reconnaissable entre mille, source d'orgasmes plombés.
L'inspiration dressée toujours aussi fermement ces dernières années l'ont vu multiplier les albums, rarement sous son propre nom ("Songs Of Torment, Songs Of Joy" en 2008), le plus souvent sous différentes bannières. La dernière d'entre elles se nomme The Doomsday Kingdom, projet solitaire démarré en 2015 et devenu un groupe à part entière en recrutant le fidèle guitariste Marcus Jidell (Avatarium), ainsi que le batteur Andreas Johansson (Royal Hunt) et surtout le chanteur de Wolf, Niklas Stålvind, choix de prime abord curieux sinon improbable mais que la nature très heavy de l'entreprise justifie en réalité pleinement.
Entre le retour de Candlemass, qu'on croyait mis en sommeil discographique, certes le temps d'un EP ("Dark Are The Veils Of Death") et le troisième opus de Avatarium, "Hurricanes And Halos", prévu pour le mois de mai, nous pouvions redouter un album trop vite emballé, crainte soulignée par le nom assez convenu de ce nouveau super groupe. Il n'en est rien bien entendu. Même lors des heures les plus obscures de son principal port d'attache, à l'époque de "Dactylis Glomerata" ou "From The 13th Sun", le Suédois n'a jamais déçu et ce n'est donc pas encore cette fois qu'il sera pris en flagrant délit d'anémie créatrice.
Reprenant deux titres issus de sa carte de visite gravée en 2016, 'The Spectre' et l'éponyme 'Never Machine', "The Doosmday Kingdom" porte l'incontestable griffe du maître de cérémonie. Ces compositions forgées dans le marbre, sont du Leif Edling pur jus, dont on retrouve le goût pour les lignes rythmiques épaisses comme des câbles à haute tension ('The Silence'), les touches discrètement progressives et surtout ce chant haut perché qui sonne cette fois-ci plus NWOBHM que jamais.
Si le "Chapter VI" (1992) de Candlemass témoignait déjà, à sa manière, lyrique et mélodique, que le heavy a toujours coulé dans les veines du bassiste, c'est peut-être la première fois que celui-ci s'aventure autant dans cette direction ('Hand Of Hell'). Ceci étant, cet album s'enracine profondément dans un socle doom, à l'image des sismiques 'A Spoonful Of Darkness' et 'The Spectre'. Grâce au jeu flamboyant de Marcus Jidell, aussi à l'aise dans un registre sabbathien que racé et dont les morsures font très mal, à l'image de 'Never Machine' et de 'Silent Kingdom', Edling accouche d'un ensemble aussi efficace que coloré d'ambiances moelleuses , dont seul peut-être le terminal 'The God Particle, s'étirant inutilement sur près de dix minutes, toutefois riches de saveurs progressives, en freine quelque peu l'impact.
Mais c'est vraiment là la (très) relative faiblesse d'un disque imparable, bijou d'un heavy doom aussi puissant qu'évolutif.