Le retour aux sources est salvateur dans nos époques troublées : revenir aux bases solides de nos amours, aux sources fluides de nos passions débordantes, au rejet d'une certaine forme de futurisme qui voudrait que la musique soit un éternel saut en avant, dans le vide et sans filet, bref affirmer les bases qui plaisent et qui guident l’inconscient musical.
Nihilism est une formation qui ressuscite les bases musicales construites dans les années quatre-vingts : années de l'explosion de Morbid Angel, Obituary, Death, de la déferlante de sang du death purulent, violent et résolument nihiliste, du rejet des bases musicales et critique jusqu'à outrance d'une société dans laquelle ces groupes ne se reconnaissaient pas. Nihilism est donc de ceux-là, de ceux qui ingurgitent les éléments fondateurs de cette musique, tout en regardant toujours vers l'horizon du futur.
Même si cette musique pioche allègrement chez Vader ou Suffocation, la formation la sublime en y incorporant des préoccupations sociétales actuelles, un son contemporain, comme le prouvent les première secondes de 'Ocean's War'. Sur cette première étape, les musiciens érigent un climat inquiétant fait de riffs aux mélodies étranges, de rythmes plombés et d'une voix grasse d'ours mal léché réveillé trop tôt de son hibernation.
L'histoire de cette école du metal de la mort nous est contée dans cet 'Ocean's War' et nous nous sentons irrémédiablement immergés dans une substance sonore moite et glauque, une sécrétion âcre qui envahit l'espace et dissémine ses humeurs entre violence et colère.
La guerre aux conventions est immédiatement déclarée : la batterie pilonne comme une folle, la basse écartèle les tympans, la guitare nous noie sous des vibrations puissantes à la mise en place précise. Ensuite un blast dantesque déstructure le morceau, brise les tibias, alors que la voix oscille entre cavernes poisseuses moisies et glauques, et hauteurs acides et terrifiantes. 'Beyond Redemption' reprend les mêmes éléments sur un tempo à peine plus rapide, saupoudré de quelques accélérations que la formation sait injecter avec art.
Enfin, 'The Hanging Tree' nous propose une introduction acoustique suave, sensuelle et contemplative, alors que sa suite nous tabasse sous un déluge de décibels ; 'Apxn' est une plage sensible à la beauté presque irréelle, gorgée de soleil estival et battue par des vents rafraîchissants. A la fois mystérieuse et belle, cette petite composition nous guide vers un ailleurs métallique : 'Blackfish' au rythme épileptique gorgé d'une colère noire ; 'The Old Tree Died' est dans une lignée très sombre et moite, digne de Supuration ; 'All Will Be Done' étale une lourdeur quasi-doom, des étirements temporels qui semblent infinis, des sonorités venues d'un autre monde musical...
"Beyond Redemption" dévoile une musique qui revient à l'essence d'un genre, en exprimant sa substantifique moelle, un opus dont le son et les thématiques sont en phase avec l'époque. Il inaugure aussi le renouveau des studios Mosrrisound. Avec cette galette effrayante entre "Altar of Madmess", "Cause of Death" ou "Post Momentary Affliction", dont la beauté subjugue irrésistiblement au fil des imprégnations sonores, et dont le charme discret et si particulier se cache dans tous les recoins, même les plus repoussants.