Malgré ses grandes retrouvailles avec son gang, Alice Cooper avait cruellement manqué de pertinence sur son précédent album, une collection de chansons, un album à rallonge et trop d´invités (dont certains n´auraient jamais dû accepter, comme Kesha). Avec son nouvel album illustré par un doppelgänger diabolique, notre ami Vincent Furnier retrouvera-t-il le chemin du théâtre de la cruauté ?
Après les errements de "Welcome 2 My Nightmare", Alice Cooper semble avoir fait amende honorable. S´il renoue anecdotiquement avec les membres originaux du groupe sur deux morceaux, Alice n´a pas renoncé à s´attacher les services de noms prestigieux. Ces derniers ne seront pas réduits au statut de figurants et la liste semble à première vue plus alléchante que sur le dernier album, avec la présence du bassiste Roger Glover (Deep Purple), du batteur Larry Mullens (U2) ou encore de Billy Gibbons (ZZ Top).
Le roi des squelettes semble avoir compris qu´il lui fallait redorer son blason un peu dégarni par le temps. Nul besoin de se remettre en question ou de tenter quelques expérimentations vers le metal industriel ou de surfer sur la vague en faisant un duo avec Nicki Minaj. Le Coop' décide d´accomplir la sinistre besogne qui porte sa signature, n´hésitant pas à se faire référentiel : 'Dead Flies' évoque 'Caught In A Dream', 'Rats' et les sonneries de classe de 'Paranoiac Personality' rappellent le bon temps de l'album "Schools Out", on peut entendre surgir le riff de 'No More Mr Nice Guy', 'Holy Water' évoque 'Some Folks', les paroles de 'Fallen In Love' renvoient directement à ses plus grandes chansons. Pourtant notre oncle Fétide du shock rock n'aurait-il pas tendance à radoter, maintenant qu'il a l'âge d'intégrer un hospice?
Que le fan se rassure, la météo est au beau fixe, les guitares claquent, les riffs pleuvent, la section rythmique zèbre les compositions d'éclairs. 'Paranormal' sonne comme un nouvel hymne aux cauchemars de la nuit, aidé en cela par la basse terrifiante de Roger Glover et un solo de guitare aussi dérangeant que jouissif. 'Paranoiac Personality' s'échappe de son carcan lourd sur les couplets pour nous faire valoir un refrain d'anthologie avec chœurs à l'appui. 'Dynamite Road' file à pleins décibels sur des autoroutes qu'ont naguère empruntés ZZ Top ou Motörhead, temporisé par 'Private Public Breakdown' qui lui succède. Et lorsque survient la ballade orageuse 'The Sound Of A', l'auditeur se dit qu'Alice Cooper a rebandé son arc. On pourra regretter 'Fireball' qui, malgré sa rythmique de rouleau compresseur, écrase surtout la voix d'Alice et l'orgue (joué par Bob Ezrin en personne).
Alice Cooper a souvent brodé autour d'un canevas
fantastico-horrifique mais sans avoir renfermé toutes les pistes dans un
thème unique, préférant élargir les horizons. Cet album ne viendra pas faire
mentir ce principe, les thèmes de ses chansons lorgnent vers les sujets de
prédilection de son auteur : croque-mitaine (entité amoureuse sur 'Paranormal', bourreau sur 'The Sound Of A'), sectes de
cannibales ('Dead Flies') ou de rongeurs ('Rats'), paranoïa ('Paranoiac Personality') ou encore profession de foi via un autoportrait en fille authentique dans un monde de plastique (''I'm a rock and roll queen in a hip hop world'' chante t'il sur 'Genuine American Girl')
On pourrait toutefois reprocher à cet album sa longueur. A nouveau, le Coop a décidé d´offrir quelques extraits live où il revisite les joyaux de son répertoire. Si l´auditeur commence à en avoir assez de ces bonus qui alourdissent la durée déjà conséquente du disque, il est difficile de rester insensible devant une collection explosive : 'Under My Wheels', 'No More Mr. Nice Guy' ou un 'Billion Dollars Baby' sorti tout droit des feux de la Géhenne, nous prouvent qu´Alice Cooper est bien une bête (nocturne) de scène. "Paranormal" prouve qu'à près de 70 ans, le venin d'Alice Cooper peut toujours faire mouche !