Sous le nom de La Féline se cache une jeune femme : Agnès Gayraud, agrégée de philosophie, critique musicale, compositrice et interprète. A l'origine un trio, le groupe tirant son nom d'un film fantastique américain de 1942 a évolué pour former un duo autour d'Agnès et Xavier Thiry (synthétiseurs et programmation). Auteur d'un premier album intitulé "Adieu l'Enfance" en 2014, La Féline revient en cette année 2017 pour être porté en "Triomphe", un nom évocateur ?
Baignant dans une pop classieuse, haut de gamme, le disque varie les plaisirs et avance avec souplesse, grâce et douceur. Tantôt tribal dans 'Senga' qui, s'il faut un repère pour l'auditeur, rappelle les travaux de Zazie (repère trompeur car le disque va plus loin), mystique dans 'Samsara', moyenâgeuse dans 'La Femme du Kiosque sur l'Eau' (Dead Can Dance), les compositions sont profondes, éthérées, portées par la voix sur le fil et presque fragile d'Agnès. Loin de tomber dans la facilité, la pop de La Féline réussit l'alliage d'une musique sans concession ('Le Plongeur') tout en étant à la fois brillamment accessible notamment dans 'Les Séparés (Si Nous Étions Jamais)' ou 'Gianni'. Les sentiments sont ainsi nuancés, aidés par l'alternance de titres plus immédiats et d'autres plus exigeants rappelant Kate Bush dans la manière de composer et de structurer ses albums.
L’œuvre d'Agnès s'inscrit dans cette nouvelle vague pop qui tire son origine à la fois dans la simplicité et les expérimentations à foison des années 60 et 70 (le spectre de Françoise Hardy plane sur cet album), complétées par le modernisme actuel avec ses touches électro en juste quantité et dans le mixage contemporain.
Alors certes ici point de solo à rallonge, les guitares sont d'ailleurs discrètes, point de chant hurlé, "Triomphe" est susurré, léger comme une plume, cotonneux comme le brouillard. Il n'invite qu'à se laisser porter par le sens de la mélodie et des mots de La Féline qui transcende la pop en y apportant douceur et grâce qui la définissent.