Aversions Crown est une formation australienne, avec trois albums au compteur, "Servitude", "Tyrant" et aujourd’hui "Xenocide", qui dispense une musique entre colères sèches, imprécations graisseuses et rage folle, propre à faire exploser les fosses communes du commun des mortels.
Dans ce style musical aride, basse, guitare et voix criardes se taillent la part du lion pour ériger un mur sonore gluant et étouffant, pour coller l'auditeur aux vitres, l'expulser à l'autre bout de la pièce tel le post-pubère Mc Fly, scotché au mur par une salve sonore de puissance explosive. Tel est le credo de Aversions Crown, un credo dans lequel la rage et la puissance cohabitent avec la mélodie et les instants où le temps suspend son vol immatériel dans des compositions furieuses qui paradoxalement invitent à la contemplation.
Douze pistes, comme autant de coups de fouet qui disloquent les étoffes, entaillent les chairs. Des moments glauques construisent une variété de science-fiction où se mêlent humains et extra-terrestres dans un combat quasi sans merci, car la violence est omniprésente. Dans cette brume âcre de violence pure, surnagent parfois des mélodies simples et efficaces qui exhaussent les pistes comme des points d'ancrage isolés qui guident la progression aveugle dans ce magma sonore.
'Void' initie la séquence vibratoire par une une mise en ambiance digne du meilleur de la SF : la montée en puissance se fait petit à petit, à la fois mystérieuse et interrogative, comme l'astronaute dérive dans les confins de l'espace intersidéral, flottant sans espoir dans le vide froid et sombre. Puis, 'Prismatic Abyss' débute presque doucement, mais vite un blast s'installe, alors que la voix émet des cris primaux ou des grondements bestiaux qui se dissolvent dans une rivière sonore sanglante portée par une batterie marteau-pilon. Les alternances de rythmes sont nombreuses, les climats variés et le travail de mise en forme agréable s'écoule ainsi "tendrement" dans nos oreilles.
'The Soulless Acolyte' franchit une étape de plus dans l'horreur intersidérale : voix sans concession, batterie de laquelle aucun rythme ne semble émerger et guitare grasse qui englue l'auditeur dans une colère épaisse. Alors que 'Hybridization' poursuit dans cette veine terrifiante, 'Erebus' semble vouloir rompre le cycle sombre avec une introduction cinématographique et un je-ne-sais-quoi de clarté dans la mise en place, comme si le groupe détendait sa colère virulente pour la diriger vers une reconstruction lumineuse.
Aversions Crown tisse une toile intersidérale, un voyage dans l'espace vide et froid, dans lequel personne, hormis vous avec les écouteurs vissés sur la tête, ne l'entendra crier... Très violent et très sombre, l'opus nous laisse au final à bout de force, sur les rotules avec des compositions aussi puissantes que violentes, prenantes ou percutantes.
"Xenocide" est un disque qui mérite d'être écouté. Même si certains lui reprocheront un acharnement dans le propos sombre et la colère, le tout est joué avec une telle application que le charme opère immédiatement. Une rondelle à découvrir, dont le potentiel peut facilement rivaliser avec Thy Art is Murder. Par ailleurs l'opus propose un voyage intersidéral, loin des errances héroïco-fantastiques de carton-pâte et de papier mâché auxquelles nous sommes trop souvent soumis, et rien que pour ça, il vaut le détour...