Soror Dolorosa est un groupe clé du gothique à la française. Après 4 ans de travaux acharnés, nos sœurs de la pitié prennent leur envol avec Apollo, un album à la pochette ésotérique lorgnant vers Dead Can Dance. De la fusée, il ne sera guère question dans cet opus, les influences du groupe semblant plutôt le porter vers la mythologie grecque.
L´auditeur qui pénètre dans le caveau sait à peu près où ses pieds vont le mener. Aguerri, il ne manquera pourtant pas d'être pris à la gorge et étouffé par les asphyxiantes effluves du morceau éponyme. A demi-conscient, il sentira que ses sens lui joueront des tours, comme si ses mouvements s´étaient ralentis sous l´inspiration des structures rythmiques lourdes et lentes comme des najas ('Breezed And Blue', 'The End'). Pourtant une voix grave et mystérieuse résonne auprès de lui sans jamais susciter sa peur ou son dégoût, l'invitant plutôt au sommeil. L´atmosphère qui lui apparaissait irrespirable et viciée ('Night Is Our Hollow', le solo bruitiste de guitare sur 'Everyway') laisse rapidement place à une quiétude climatisée, avec des compositions nébuleuses tournées vers la lumière : 'Epilogue', le joyau pop 'Another Life', 'Locksley Hall' en hommage au poème d´Alfred Tennyson. Il pourra ainsi se laisser porter vers les limbes (le lancinant 'Long Way Home').
Le capital sympathie du groupe commence à croître, mais la mayonnaise ne prend pas toujours. La faute à de longues et répétitives atmosphères. Par ailleurs, pour du gothique et de la cold wave on se sent rarement en danger, le groupe se cantonnant à utiliser des formules qui fonctionnent, révélant des influences trop visibles (Fields Of The Nephilim, The Cure et même Bronski Beat sur 'The End'). L´usage risqué de synthétiseurs s´avère toutefois une bonne idée et offre un peu de réconfort, évitant au groupe de tomber à pieds joints dans des hommages trop explicites ('That Run' très Depeche Mode dernière période). Le groupe ferait mieux de revoir son étiquette et de jouer dans une cour atmosphérique qui lui conviendrait mieux sur cet album.
Soror Dolorosa est sans nul doute un digne représentant de la cold wave à tendance gothique en France. Adeptes de rythmiques répétitives et étirées, les Sœurs de la Douleur nous offrent un album au charme noir et hypnotique porté par la voix chaleureuse de son interprète. Pour autant, des longueurs et quelques solutions de facilité empêcheront cet album d'être placé sur l´Olympe du rock gothique.