L'annonce de la fin de Black Country Communion en 2013 avait laissé orphelins de nombreux amateurs du hard-rock classieux et jubilatoire du combo emmené par Glenn Hughes et Joe Bonamassa. Pendant ces quatre années la tension est retombée, les choses se sont apaisées et chaque musicien a poursuivi ses activités respectives. Le manque s'est installé petit à petit au point que Joe Bonamassa a proposé à Glenn Hughes de reprendre les affaires fin 2016. C'est avec un plaisir non dissimulé que l'on retrouve le quatuor pour un "BCCIV" à la pochette suggestive montrant un phénix embrasé en pleine ascension.
"BCCIV" a tout du nouveau départ pour Black Country Communion, ne serait-ce que dans son mode opératoire similaire au premier méfait du groupe qui a vu le binôme complice et fertile se réunir chez Hughes en Californie pour composer cet album. Onze jours pour onze morceaux, une fraîcheur intacte et une énergie qui ne demandait qu’à s’épanouir ont été ainsi captées dans la Magic Room de Glenn Hughes. Et le moins que l’on puisse dire est que cela s’entend et dès le début tonitruant de "BCCIV" avec deux salves successives pour mettre les points sur les "i" : ‘Collide’ et ‘Over My Head’, deux brûlots de pur hard-rock mélodique aux riffs acérés et aux refrains mémorables. Glenn Hughes fait passer le message que, bien que sexagénaire avancé, il est encore la plus belle voix du hard-rock mélodique actuel (quelles modulations en voix de tête sur ‘Over My Head’ !) et Joe Bonamassa montre qu’il n’a pas encore épuisé son stock de riffs (où va-t-il chercher une idée comme celle de 'Awake' ?) et de soli dévastateurs. Le reste du groupe est impeccable dans cet exercice même si la tendance générale de l’album privilégie les guitares plutôt que les claviers de Sherinian (très belle présence néanmoins sur 'Wanderlust', qui sonne comme un bon vieux Toto).
Ce type de morceaux très puissants et pensés dans un esprit d’efficacité pimente l’ensemble de l’album par l'intermédiaire du groovy 'The Crow', de 'Sway' aux tonalités 70's et de l'étourdissant 'Awake'. Intercalés entre ces moments de pure vitalité rock, des mets plus raffinés apportent une matière musicale plus savoureuse encore car à haute valeur ajoutée. Hughes et Bonamassa se sont rendus maîtres dans l’art de composer des pièces évolutives et protéiformes qui prennent le temps d'agréger une multitude d'éléments mélodiques et de les redéployer dans des montées en intensité majestueuses. "BCCIV" est particulièrement bien garni de ces morceaux finement arrangés (les violons et la mandoline de 'The Last Song For My Resting Place') et harmoniquement exigeants qui ont tous en commun une dimension épique et une charge émotionnelle forte. On retrouve ainsi une teinte celtique dans le mid-tempo 'The Last Song For My Resting Place', un des sommets de l’album, parfaitement chanté par Joe Bonamassa, 'Love Remains' dans lequel Glenn évoque son père disparu en 2016 avec pudeur, le blues languissant de 'The Cove' et son ascension irrésistible ou la power-ballade finale 'When The Morning Comes' magnifiée par le piano et la guitare acoustique.
"BCCIV" canalise tout le matériau créatif de la paire Hughes-Bonamassa accumulé pendant les quatre années de sommeil du groupe. Et dans le cas de Glenn Hughes, qui a dû affronter le décès de ses deux parents à neuf mois d'intervalle, "BCCIV" se nourrit d'une incommensurable rage de vivre qui transparaît à chaque seconde de ce magnifique album. Hughes et Bonamassa ont été touchés par le divin en composant un disque qui synthétise tout leur génie créatif. "BCCIV" est un monument de hard-rock mélodique et sans doute le meilleur album, dans l'équilibre, la diversité et l'émotion, de la carrière de Black Country Communion.