Freddy la Crème (ou la Crème de Freddy) a encore frappé (voire fouetté) ! Fredrik Larsson, celui qui se cache derrière ce déroutant pseudonyme, avait réussi contre toute attente à passer en quelques années de youtuber talentueux à musicien accompli. Après deux albums qui faisaient la part belle à de belles ballades ensoleillées voyageant dans une dimension progressive, Freddy a maintenant, comme le figure la pochette, le regard tourné vers le bord du précipice : chute en avant ou un nouvel envol ?
Comme à son habitude, Freddegredde est l´affaire d´un unique individu. Si naguère il allait demander assistance à droite ou à gauche, ici l´artiste s´assume en tant que créateur solitaire de son œuvre : guitare, claviers, chant, basse, percussions lui sont réservés. L´auditeur qui n´a pas encore croisé son chemin entrera dans un univers doux, reposant, relaxant. Car Fredrik Larsson a une formule secrète pour réaliser de parfaites ballades : même si sa voix n´a guère de puissance, elle attaque directement au cœur. ´Guide Me´ semble tout simple avec son arrangement de guitare acoustique et de clavier mais la voix légèrement implorante et un redoutable solo de guitare électrique emportent l´adhésion. ´When We Dance´ et ses caresses de guitare acoustique, ses cordes majestueuses et ses arpèges veloutés de piano boxent dans la même catégorie. On remarquera toutefois une volonté de faire confiance à l´électronique avec l´usage de synthétiseurs qui apportent une nouvelle dynamique au refrain déjà entrainant de ´Fly Away´ ou sur ´Away We Go´ où il se rapproche d´Owl City voire de Nobuo Uematsu.
Gentil, sympathique mais certes naïf voire niais (les paroles de ´Have A Bite´, ´Rebirth´ qui pourrait participer à l´Eurovision.), cet album est dépourvu de ce qui faisait le charme de ses prédécesseurs : le rock progressif. Oubliées les brillantes parenthèses épiques certes minoritaires, à l´exception des tensions de la mini épopée ´The Keepers Of The Sky´ et dé ´Unraveled Lies´ et son expansion symphonique. Ainsi, le format des chansons s´enferme dans des carcans plus raisonnables, peu enclins à progresser. On ne saurait blâmer un artiste de vouloir se façonner un nouveau public, mais la démarche qui consiste à mettre subitement de côté une partie de ce qui faisait son charme est hautement discutable. Malheureusement, il ne s´agit pas du seul défaut d´ "Eyes On The Edge". Les albums de groupes actuels estampillés rock progressif ont tendance à s´aventurer - le plus souvent à tort - au delà de l´heure d´écoute. Même dépourvu de rock progressif, cet album affiche une durée de 64 minutes. Constitué en grande partie de ballades homogènes ("interchangeables" diront les mauvaises langues), l´auditeur risque de finir par inévitablement attraper un coup de soleil aux oreilles !
Freddegredde possède un certain talent pour écrire de belles ballades mais son troisième album a mis de côté tout le charme progressif qu´il pouvait avoir pour viser une audience plus large. En regard des faibles ventes, le pari est raté et il est bien dommage que l´artiste n´ait pas penser à scinder son album en deux et nous proposer ses ballades au goutte à goutte. Une grosse déception, espérons qu´il y ait des ascenseurs au fond des précipices.