Le premier album de ce groupe suédois (un de plus) n'avait pas du tout convaincu la rédaction de Music Waves. Deux albums et 9 ans plus tard, sommes-nous dans la continuation du naufrage ou bien le quatuor a-t-il pu trouver au fond de lui-même des ressources pour se projeter vers de meilleures auspices? "Abiogenesis", terme qui renvoie à la naissance de l'univers à partir de matière inanimée, penche-t-il plus vers la renaissance ou vers l’encéphalogramme plat?
Il faut dire que Korea prend le risque de jouer sur une corde raide à la frontière de plusieurs univers musicaux. L'album se veut à la fois accessible, mélodique, progressif, empreint de gravité voire de profondeur et d'une certaine puissance toute métallique. Nombreux sont les groupes qui se sont cassés les dents faute d'identité musicale et de cohérence. Pour traverser ces écueils, les Suédois tentent de s'appuyer sur plusieurs marqueurs forts. Tout d'abord la basse de Robert Bunke qui délivre un travail remarquable : ce son vibrionnant et omniprésent sert à la fois de socle solide et de clé de voûte. L'épaisseur et l'environnement sonores sont suspendus à ces notes ronflantes qui apportent à coup sûr ce sentiment rassurant d'ancrage indestructible.
L'autre point fort de "Abiogenesis" consiste en cette subtilité et créativité mélodique. Cette dernière qui fait preuve d'une certaine langueur parvient à se montrer virevoltante ici ou là, apportant un caractère accessible et convaincant à de nombreuses reprises. Que ce soient les refrains efficaces, le chant suave, les chœurs ou encore les guitares alternativement envoûtantes ou tranchantes, toute la musique de Korea est tournée vers la séduction de l'auditeur et cela fonctionne. Les riffs de 'Fanatic', la délicatesse et l'efficacité de 'Exodus' ou les ambiances plus atmosphériques de 'Abyss' ou surprenantes de 'Do You Want My Laqnmover' ne suffisent pas à décrire la richesse de cet album. 'New Horizon' et 'Stand Down' sont presque pop et rappellent un peu le Paradise Lost époque 'Host'. Des accents à la Porcupine Tree mais surtout Lunatic Soul ou encore Sylvan peuvent être retrouvés, mais aussi des passages plus électroniques avec 'Stand Down' et 'Terminal Velocity', sans aucune sensation de dépaysement.
Et c'est là la force de Korea qui nous embarque complètement dans son univers dans lequel chaque morceau possède sa personnalité tout en assurant une légitimité et une cohérence d'ensemble garantie par un son particulier et un sens de la mélodie essentiellement mélancolique mais qui parvient à être entraînante. La renaissance a eu lieu et Korea figure parmi la liste des groupes à suivre absolument.