Reste-t-il encore quelque chose à inventer dans le domaine de la musique et particulièrement dans le metalcore ? Une partie de la réponse est apportée dans le dernier bébé de Motionless In White "Graveyard Shift". Longtemps dans l'ombre de Korn ou de Slipknot, les Américains ont, depuis leur début, su se dégager de leurs aînés en flirtant notamment avec une musique proche de Marilyn Manson, mêlant habilement metalcore et indus, et en travaillant également leur image au fil des albums, avec notamment pour ce nouvel opus un artwork inquiétant, sombre comme les looks des membres du combo, à voir sur le site internet figurant en bas de cette chronique.
La musique d'une grande technicité et dense avec ses deux guitares apportant de l'épaisseur emprunte le chemin des illustres groupes cités allant de concert avec cette imagerie cultivée. L'auditeur retrouve la brutalité des riffs et le chant coutumier du style maîtrisé par Chris Motionless ('LOUD'). Les Américains n'oublient pas les fondamentaux et
œuvrent ainsi dans la lourdeur notamment avec le formidable 'Ladder' hurlé de
tout son cœur par leur leader sur des couplets qu'illumine son chorus dantesque agrémenté
d'un très beau solo de gratte. 'Eternally Yours' qui clôture l'album sur fond de vampirisme transpire par tous ses pores cette veine metalcore fusionnant scream et chant clair que rehaussent des chœurs bien amenés, le tout sur une rythmique hypnotique de haut vol.
Reste la question en suspens... Là où le groupe se démarque, c'est en intégrant avec parcimonie des éléments électro qui s'imbriquent parfaitement à l'ambiance ('Necessary Evil' avec Jonathan Davis - Korn -, 'Rats'). Les refrains contrebalancent les couplets plutôt dark et parfois alourdis par des touches djent en revêtant des atours souvent épiques qui restent en tête assez aisément. 'Not My Type : Dead As Fuck 2' illustre ainsi parfaitement ce propos du mélange de genres a priori antinomiques faisant de ce titre le plus cinématographique du disque. Avec ses samples qui parsèment le morceau, l'auditeur pourra se rêver (ou se cauchemarder) enfermé dans un parc d'attraction hanté rappelant une nouvelle glauque de Stephen King ou un vieux film de série Z d'horreur. Grisant !
Les titres vont pour la plupart à l'essentiel et ne dépassent pas les 5 minutes, rendant le tout assez accessible à tous ceux qui ne connaissent pas le genre et satisfaisant les amateurs. En outre, la production âpre contribue à faire de l'album l'une des plus belles sorties de cette année. S'inscrivant dans la continuité des précédents albums en revenant à un metalcore plus naturel tout en y apportant des touches modernes sans exagération, Motionless In White trouve ainsi l'équilibre entre tradition et contemporanéité. Les Américains démontrent qu'il faut compter sur eux avec cet album très agréable.