Depuis la sortie de "What Kind Of Creature Am I?", l'actualité de Michael Mills a surtout été marquée par sa participation dans "The Source" quatre ans après sa première apparition dans un album du géant Hollandais Arjen Lucassen pour "The Theory Of Everything". Du côté de Toehider, le silence qui a suivi la sortie du deuxième album des Australiens en 2013 a éveillé autant d'impatience que d'inquiétude au regard de l'habituelle fertilité du groupe à proposer de nouveaux morceaux (via des EP notamment). A côté de sa parenthèse ayreonienne, Mills préparait son retour pour un troisième album, "Good" au titre détonnant, dont la petite histoire raconte qu'il lui a été inspiré en hommage au magistral "Bad" du regretté Michael Jackson sorti il y a trente ans.
Il se passe toujours quelque chose dans une composition de Mike Mills. C'est un peu le postulat que l'on peut tirer de l'écoute des deux albums et de la quinzaine d’EP de Toehider. "Good" ne déroge pas à cette règle mais mise sur plus d'immédiateté en canalisant la fougue créatrice de son géniteur dans l’art de procéder aux mélanges des genres. Ainsi les évolutions des compositions sont plus lisibles, les structures plus linéaires et les débordements canalisés dans des ponts aux hauteurs épiques comme dans le speed ‘[funnythings]’ agrémenté de chants mercuri(y)ens ou le popisant ‘This Conversation Is Over’, seul titre pour lequel Mills invite d'autres musiciens, qui accueille un superbe solo tout en lyrisme.
Toehider affiche encore plus clairement sa volonté d’aller à l’essentiel dans le sur-vitaminé et entêtant ‘Millions of Musketeers’, la ballade acoustique ‘Dan vs. Egg’ ou le funky ‘I’ve Been So Happy Living Down Here In The Water’. Par ailleurs, les amateurs du côté le plus progressif de Toehider, celui que l’on avait pu entendre à l’œuvre dans "What Kind Of Creature Am I?" avec l’étourdissant ‘Meet The Sloth’, resteront sur leur faim avec “Good”. Même un titre comme ‘How Do Ghosts Work ?’, qui aurait pu évoluer en metal progressif déchaîné, se “cantonne” à une version édulcorée un peu à la manière des dernières compositions des Norvégiens de Circus Maximus.
Hormis cela, la musique de Toehider est toujours aussi jubilatoire à écouter (le disco déjanté 'It’s So Fikkis!) et les textes amusant à décortiquer (ce même 'It’s So Fikkis! qui propose d'expliquer le sens d'un mot inventé pour l'occasion : Fikkis). Un des grands intérêts de "Good" réside aussi dans ses parties vocales, chant principal et multiples couches de chœurs ('Dan vs. Egg’ ou 'It’s So Fikkis!'), toutes assurées par Michael Mills qui met admirablement à profit les quatre octaves dont la nature l’a généreusement doté. Une importante partie de la puissance et de l'émotion transmise dans les différentes compositions de "Good" transite par le souffle de l'Australien qui n'a pas été choisi par hasard par le dénicheur de talents Arjen Lucassen.
En termes de qualité musicale, la satisfaction et le plaisir sont une fois de plus au rendez-vous mais on ne sort pas totalement rassasié de l'écoute de "Good". Deux raisons à cela. La première concerne la courte durée de l’album, car avec trente-sept minutes au compteur un goût d'inachevé demeure en bouche, et la seconde vient de la sensation de ne pas avoir entendu un Toehider aussi relâché et audacieux que dans ses travaux antérieurs. Ce sont les seules réserves qui nous empêchent de véritablement en faire un album à la mesure de son puissant prédécesseur.