En musique comme dans la vie, le mieux reste encore d’assumer ses choix. Plus facile à dire qu’à faire, mais au moins cela permet de ne pas perdre son identité. Stolen Memories l’a bien compris. Le groupe lyonnais joue du metal progressif et le revendique enfin avec son troisième opus "Paradox". Finies les digressions sur l’étiquette qui ont suivi la sortie de "Blind Consequence" il y a quatre ans. Un break salutaire a permis au combo de faire le point sur ses envies musicales. Inutile de passer sous silence l’aspect progressif de leur musique. Même si le metal progressif est moins vendeur que le metal tout court (quoique), c’est bien de metal prog dont il s’agit ici.
Et pas n’importe lequel. Car "Paradox" est avant tout dominé par des riffs clairement thrash. Si une filiation est à trouver, c’est sans doute vers le "Train Of Thought" de Dream Theater qu’il faut chercher. Même si cet album fut très controversé, il reste l’un des meilleurs albums de metal des années 2000. Mais il ne s’agit que d’une référence, certes parfois très marquée, notamment avec le titre ‘Hidden Hurt’. Car la grande force de Stolen Memories est de privilégier les formats courts. Pas un seul morceau ne dépasse les six minutes mais tous recèlent suffisamment d’idées musicales pour embarquer l’auditeur et ne plus le lâcher.
De l’artwork évocateur à la production très moderne, l’album respire le goût du travail bien fait. Travail de composition d’abord, caractérisé par des ponts atmosphériques (‘Red Spring’), jazz (‘The Badge’), orientaux (‘Lack Of Clarity’) voire electro (‘Constant Liar’) qui apportent les respirations nécessaires et tranchent avec les riffs lourds et thrash. Travail d’exécution ensuite car les Lyonnais sont avant tout d’excellents musiciens.
Parfaitement mixée, la section rythmique brille par son éclectisme et les patterns de batterie d’Antoine Brun lorgnent parfois vers le djent (‘Constant Liar’) et soutiennent des lignes de basse souvent brillantes (‘No Cure For This’). Mais le travail le plus remarquable reste celui de son frère Baptiste, dont le jeu domine l’album de la tête et des épaules. A l’aise dans tous les registres, le guitariste alterne riffs efficaces, arpèges inspirés (‘Hidden Hurt’) et solos shred époustouflants (‘Red Spring’, ‘No Cure For This’) parfois amplifiés d’effets whammy dévastateurs (‘Obedience’, ‘Lack Of Clarity’).
Reste le chant atypique de Najib Maftah qui ne plaira sans doute pas à tout le monde tant il est éloigné des standards du genre. Pourtant sa voix de baryton participe de l’originalité des morceaux et apporte contraste et lyrisme aux ambiances parfois lourdes de l’opus.
Ainsi, en assumant pleinement son thrash progressif de haut niveau, Stolen Memories a trouvé ses marques et s’avère une excellente surprise. "Paradox" est une réussite tant sur le plan technique que mélodique. Il serait injuste que cet album et ce groupe demeurent confidentiels. A vous de jouer !