Deux ans après un magnifique "The Pale Emperor", voici le dixième album de Marilyn Manson. Ce "Heaven Upside Down" confirmera-t-il le virage résolument rock entamé en 2015 ? Oui, en grande partie.
Le natif de l'Ohio revient avec 10 titres incisifs à l'image de celui déjà dévoilé en vidéo quelques semaines avant la sortie officielle de l'album, 'We Know Where You Fucking Live' au refrain hurlé avec rage et un riff destructeur. L'introductif 'Révélation 12' est trempé du même alliage de rock endiablé mais avec une composition plus axée sur un groove dévastateur matérialisé par une basse ronflante que l'on retrouve également sur la funkysante 'Saturnalia'. Du haut de ses huit minutes, cette dernière condense tout le savoir-faire de Manson et sa faculté à intégrer avec brio les éléments electro, blues, groove, rock et psyché qu'il affectionne, le tout porté par des mélodies directes et efficaces.
L'excentrique rockeur reprend certaines des recettes qui ont fait le succès du précédent opus sur l'excellent 'Tattoed In Reverse' qui rappelle fortement 'Killing Strangers' par son rythme en mid-tempo saccadé d'un riff entêtant, ainsi que sur 'Kill4Me' aux allures de hit en puissance grâce à un traitement plus pop débarrassé des hurlements souvent incompatibles avec la diffusion répétée sur les ondes. Ce n'est d'ailleurs pas le seul titre sur lequel Manson se fait plus doux dans son chant, ainsi 'Blood Honey' et 'Treads Of Romance' font la part belle aux arrangements subtils de piano alors que les mélodies, enveloppantes de douceur sur des tempi bluesy que le chanteur multiplie depuis deux albums, apportent une variété bienvenue à ses productions.
Pour le reste, notons que les thèmes abordés sont conformes aux habitudes du fantasque Américain, au premier rang desquelles son approche ambiguë de la religion très présente sur cet album. Les paroles de l'hypnotique 'Say10' en sont l'exemple absolu ("You Say God and I Say Satan, .... Is it above, or is it below") et n'ont pas fini d'entretenir son image controversée sur cet aspect qu'il s'amuse à entretenir et à cultiver au fil de sa carrière. Restent tout de même des éléments purement issus du metal industriel comme des arrangements brutaux et dérangeants tels que la rythmique de 'Jesus Crisis', dont les textes feront à nouveau se hérisser les plus puritains de ses détracteurs qui, soit dit en passant, n'écouteront l'album que pour s'en offusquer ; il faut bien qu'ils s'occupent.
À l'image de "The Pale Emperor", "Heaven Upside Down" est un album très équilibré, reflet de la maturité créative d'un artiste, certes un peu plus conventionnel qu'à ses débuts, mais dont la maîtrise d'écriture et de compositions atteint sa pleine mesure. Elle devrait être garante d'un succès à la hauteur de son prédécesseur car les albums présentent le même équilibre entre rock, blues, indus, metal, rage, douceur et authenticité. Manson livre une prestation vocale de haute volée et cultive son image gothique et Antéchrist qui a fait son succès. Marilyn fait du Manson, sans surprise cette fois-ci mais avec un talent grandissant.