Il en va parfois des nouveaux venus sur la scène musicale comme d’un nouveau vin : lors de la première dégustation, on cherche à rapprocher le breuvage de parfums connus, afin de se donner quelques repères rassurants.
La première écoute de "Imaginary Menagerie", premier album de Day Shift, quintette britannique quelque peu déjanté définissant sa musique comme du psychedelic space-rock, ne m’a pas laissé dans un premier temps de souvenir impérissable. Et puis, deuxième gorgée aidant, des arômes appétissants sont venus chatouiller agréablement mes oreilles : une bonne grosse touche d’Ozric Tentacles pour le côté effectivement psychédélique, complétée d’une dose de Porcupine Tree et de guitares tantôt puissantes, tantôt floydienne, le tout accompagné d’une ivresse hypnotique servie par une section rythmique implacable et répétitive faisant dodeliner les têtes dès les premières mesures de "The Clothes Horses".
"The Happy Elephant" enchaîne sur le même mode, avec ses guitares orientalisantes, tandis que "The Alternative Magpie" installe une rythmique Deep Purplesque propice aux riffs de guitare disséminés tout au long de ses 8 minutes. Un peu plus tard, on trouve également "The Abstracted Sloth", morceau que l'on pourrait croire tout droit issu de la (bonne) discographie des "Levellers".
Et puis "The Unwashed Platypus", morceau de grâce qui enfonce définitivement le clou quant au potentiel de ce groupe : une première partie à la Steve Hogarth, tout en délicatesse, avant une montée en puissance progressive de guitares digne du meilleur Porcupine Tree (et de Yellow Hedgerow Dreamscape notamment). S'ensuit un petit break aux sonorités électroniques (tiens, du JMJ ... Jean-Michel Jarre bien sûr !), et c'est reparti pour un final de 6 minutes où tous les styles abordés précédemment se mêlent les uns aux autres pour ponctuer ce premier album de la plus belle des manières.
La musique de Day Shift est-elle vraiment progressive ? Oui sans aucun doute, et pas seulement parce que les compositions sont longues. Certes, on ne trouvera pas ici des breaks mélodiques ou rythmiques à tous les coins de rue, plutôt des ambiances et des changements d'intensité. Il n'empêche que, alors que leur deuxième album, est en préparation, on ne pourra que recommander l'achat de ce CD, auquel on ne trouvera que deux petits défauts (ceux de la jeunesse peut-être ?) : tout d'abord, un chant un peu trop plat (ou mal mis en valeur) par rapport à la puissance instrumentale délivrée tant par la section rythmique que par les guitares en fusion de Nick Beere, et puis une durée totale frustrante (42 mn) par rapport au plaisir ressenti à l'écoute des différentes compositions.