Sans vouloir lui attribuer une importance qu'il n'a pas, reconnaissons toutefois que Mark Greening, batteur aussi génial qu'instable (ceci expliquant sans doute cela), en retournant en 2012 dans le giron maternel, avait su alors rendre à nouveau excitant un Electric Wizard dont "Black Masses", nonobstant de réelles qualités, commençait à araser une inspiration autrefois si nocive. Grâce au retour du cogneur prodigue et son groove animal, "Time To Die" tendait un pont entre le Wizard originel, pétri d'une décadence occulte, et celui né en 2003 d'un line-up renouvelé, moins evil et plus liquoreux malgré la présence de Liz Buckingham, déesse du riff d'airain.
Greening parti cette fois-ci pour de bon, le groupe de Jus Oborn livre avec "Wizard Bloody Wizard" un neuvième album dont la vitrine laisse de prime abord augurer un déficit créatif regrettable entre son titre peu inspiré, référence évidente à Black Sabbath, et un visuel digne de Impaled Nazarene. Mais que cache donc son contenu ?
Si les premières écoutes se révèlent rassurantes, confirmant le retour en arrière entamé par son prédécesseur, les limites du stoner doom forgé par les Britanniques, entrevues dès "Witchcult Today", ne peuvent au final qu'affleurer à la surface de compos qui ne parviendront jamais à sonner aussi heavy, à suinter un sang aussi noir que celles qui remplissaient "Come My Fanatics" et l'indétrônable "Dopethrone". Il n'y a rien dans cet opus qui n'ait déjà été fait auparavant par le groupe lequel, en troquant depuis longtemps la beuh pour l'acide, a dilué dans un décor de série Z sa dimension rituelle au goût d'interdit.
Ceci étant, on ne saurait bouder son plaisir face à ce disque plus stimulant que ne l'était "Black Masses". 'Hear The Sirens Scream' pactise avec les ténèbres pachydermiques du grand Sabbat Noir, 'See You In Hell' est prisonnier d'une gangue de mazout et dégueule de ces grattes au bord de la rupture tandis que 'Necromania' est du pur Electric Wizard biberonné aux films de la Hammer et à Jesus Franco.
Surtout, fermant la marche, se dresse l'immense (à tout point de vue) 'Mourning Of The Magicians', pandémonium orgiaque long de presque dix minutes, où l'organe enfumé de Jus Oborn s'accouple avec la six-cordes aussi féline que tellurique de sa muse en une apothéose ferrugineuse. On se doit d'ailleurs de saluer la beauté obscure que sécrète cet instrument qui règne en maître au sein de cet ensemble rampant et volcanique.
Reste qu'en dépit d'une réussite qui la place (presque) à égalité avec "We Live", cette offrande confirme que (le vrai) Electric Wizard est définitivement mort en 2002 avec "Let Us Pray" et l'explosion du triumvirat magique Oborn/Greening/Bagshaw...