Contrairement à ce que son titre pourrait laisser croire, "Grimmest Hits" n'est pas une compilation mais bel est bien la nouvelle enclume du père Wylde sous l'égide d'un Black Label Society qu'il trouve quand même le temps de besogner, à intervalles de plus en plus irréguliers il est vrai, entre la carrière qu'il mène aussi sous propre nom et des concerts avec son éternel père spirituel Ozzy Osbourne ou le cover band Zakk Sabbath (ça ne s'invente pas !).
Quatre années se sont donc écoulées depuis un "Catacombs Of The Black Vatican", en demi-teinte, qui confirmait bien malgré lui que le jeu du bonhomme n'est jamais aussi excitant que lorsqu'il est (bien) accompagné par le chanteur du Sab'. Guitariste brillant mais parfois outrancier, Zakk a besoin d'être tenu en laisse, condition pour qu'il donne toute la mesure d'un talent aussi généreux que bourru.
Or, contre toute attente, ce dixième album studio dévoile un musicien plus posé, moins impétueux. S'il n'en fait toujours pas moins preuve de cette sauvage logorrhée guitaristique dont il a le secret, il semble s'être (enfin) assagi. La qualité de cette nouvelle poignée de chansons s'en ressent. Variées et nerveuses, celles-ci brillent de mille feux, certes riches en gras mais sans rien à jeter dedans. Secondé par le bassiste John DeServio, le batteur Jeff Fabb et Dario Lorina à la guitare rythmique, l'Américain surprend surtout par les nuances dont se pare sa performance et ce, à tous les postes qu'il occupe.
Armé de sa fameuse Gibson Bullseye, il offre une palette allant du gros heavy qui tache ('Room Of Nightmares', 'Illusions Of Peace') au rock sudiste gorgé d'émotions ('Nothing Left To Say'), du blues imbibé de Jack Daniels ('The Only Words') au hard rock le plus flamboyant ('Disbelief'). Puissantes et vivifiantes, ses saillies sont un régal pour les cages à miel et devraient donner le gourdin aux astiqueurs de manche. Plus étonnant encore est son chant. Si l'ombre de son mentor recouvre souvent ses lignes vocales ('Trampled Down'), sa voix se fait plus profonde, plus veloutée lorsqu'elle se fond dans le décor tranquille de ballades et mid-tempos pleins de feeling, à l'image de 'The Day That Heaven Had Gone Away' qui le voit roucouler comme un bluesman.
Par rapport à ses récents aînés, "Grimmest Hits" tire sa force à la fois dans sa façon d'assumer l'héritage sabbathien ('All That Once Shine') tout en soulignant les émotions et les atmosphères de compositions qui ont du corps. Ce faisant, cet opus possède ce qui faisait défaut à "Catacombs Of The Black Vatican" notamment, c'est-à-dire ce qu'on appelle une âme. S'il n'a plus rien à prouver, Zakk Wylde témoigne qu'il a encore des choses à dire avec un Black Label Society dont cet opus est un des plus jouissifs enfantés depuis (très) longtemps.