Orion est peut-être l'un des derniers symboles du rock progressif à l'ancienne en France encore en activité. En 35 ans d'existence, le groupe a sorti trois albums et présente sa nouvelle offrande en cette fin d'année. Orion ferait-il partie des artisans du prog ? Plus tout à fait car "Le Survivant" est le troisième album en 4 ans seulement, montrant une frénésie subite à vouloir coucher sur CD une inspiration qui semble sans limite. En réalité, "Le Survivant" est le second album inédit car "Mémoire Du Temps" (2013) était une compilation réarrangée d'anciens morceaux studio qui n'avaient jamais été enregistrés.
Si "La Face Visible" (2015) contait la chute du mur de Berlin, le dernier-né évoque le sujet écologique : la Terre est en passe d'être détruite en raison de l'attitude des hommes vis-à-vis de la nature, l'humanité suivra et nous sommes un peu tous des survivants. Orion utilise la musique pour dénoncer, alerter et participer, à son niveau, à une prise de conscience écologiste trop balbutiante et remise continuellement en cause.
L'évocation de ce sujet n'est pas une nouveauté puisque le premier album s’intitulait "La Nature Vit, l'Homme lui critique....". Déjà à l'époque le groupe était conscient des dangers et dans ce nouvel album constate que presque 40 ans plus tard, peu de choses ont évolué.
Sur la forme comme sur le fond, la texture de l'album sonne très seventies, notamment les vocaux très lointains, souvent vaporeux sur une musique pleine de cassures comme dans l'entrée en matière 'Big Bang'. Ce titre illustre en huit minutes la création de la Terre, imagée par une longue introduction musicale chaotique où se bousculent les plages de clavier vintage avec les saillies de guitare multipliant les breaks, à laquelle succèdent des parties chantées plus calmes faisant le pont avec une fin de morceau jazzy et presque sereine. Comme beaucoup de morceaux typés progressif, les instrumentaux se taillent la part du lion, témoin le magnifique 'Cumulostratus' léger comme un nuage, qui accentue un peu plus l'essence jazzy (King Crimson) avec des arpèges de guitare sublimés par un piano semblant presque improvisé sur un fond rythmique plutôt cool.
Les compositions sont principalement concises et évitent de partir dans des longs délires qui se révèleraient trop stériles. Le combo privilégie l'efficacité en durcissant le propos comme 'Dans Peur Du Vide' où la musique alterne passages agressifs et moments calmes outre un chant plus habité (qui rappelle un peu les Québécois de Jelly Fiche), ou en utilisant l'effet de répétition - un peu excessif dans 'Le Dernier Arbre' plus simple et à l'interprétation vocale presque acrimonieuse.
Si les chansons paraissent désuètes en raison d'un mixage étiqueté seventies accentué par des paroles directes sans prétention hautement philosophique, la musique constitue le cœur du projet. "Le Survivant" est un album pétri de qualités instrumentales et construit sur une base old school totalement assumée qui lui apporte un charme crimsonien voire floydien, à l'odeur de vinyle, à vous en faire ressortir vos platines.