Malgré son nom, Lesoir ne nous vient ni de France, ni de Belgique ou de tout autre pays francophone mais des Pays-Bas. "Latitude" est le quatrième album du groupe, un rang confirmé par le IV latin figurant sur la pochette devant le titre. D'après Gentle Art of Music chez qui il vient de signer, Lesoir s'est davantage concentré sur les aspects progressifs de sa musique que sur ses précédentes productions. Une telle annonce associée à la présence dans le line-up de deux chanteuses a certes de quoi allécher l'amateur de musique complexe et raffinée.
Et tout commence pour le mieux, tel qu'on pouvait l'espérer. Une ouverture piano-voix sur une ritournelle mélancolique reprise sur une seconde partie plus soutenue par un accompagnement guitare électrique/batterie proche du metal, puis break atmosphérique et vocalises mélancoliques avant une courte reprise du thème, en jouant sur les nuances 'Modern Goddess' s'avère d'entrée insaisissable et surprenante. Un sentiment que l'on retrouve sur les titres suivants qui, en changeant fréquemment de thèmes et d'intensité, sautant de moments metal à d'autres atmosphériques, voire post rock ('In Their Eyes'), alignent tout ce qu'un amateur d'art rock ou de progressif moderne recherche, à commencer par cette impossibilité à faire le tour d'un titre à la première écoute. L'album nécessitera plusieurs passages pour permettre à l'oreille de l'auditeur de trouver ses repères.
Malheureusement, la bonne impression laissée par des premiers titres contrastés s'étiole un peu une fois atteint le premier tiers de l'album. L'alternance un peu trop systématique de passages atmosphériques et metal surprend moins. De plus, le côté metal finit par devenir un peu trop prédominant, les titres s'abandonnant à une certaine lourdeur imposée par des riffs de guitare épais et une batterie puissante au détriment du chant féminin pourtant expressif et sans défaut mais qui peine parfois à se faire entendre. Les claviers sont en retrait et la flûte promise à la lecture du line-up est sous-exploitée. 'Eden's Garden', 'Kissed by Sunlight', 'Cheap Trade' et 'Comforting Rain' sonnent souvent comme The Gathering en dépit de quelques artifices pour alléger les partitions (vocalises aériennes, plages d'orgue lointaines).
Lesoir renoue avec l'ambiance de début d'album sur 'Faith Is' sur lequel la douceur des claviers et de la flûte vole en éclats sous les magnifiques coups de boutoir conjugués de la guitare et de la batterie, intervenant cette fois fort à propos, et termine sur un duo guitare acoustique-voix ('Cradle Song') assez peu représentatif du reste.
Comme c'est souvent le cas avec des groupes voulant se montrer trop généreux (le disque atteint l'heure), l'intérêt de l'auditeur subit parfois quelques trous d'air et Lesoir aurait clairement gagné à resserrer son propos en élaguant quelques parties metal du milieu d'album, certes pas désagréables mais semblables à tant de formations metal à chanteuse, pour mieux se concentrer sur ce qui fait son originalité, ces compositions d'art rock alambiqué où ils excellent. "Latitude" reste un album agréable à écouter mais ne tient pas la promesse de ses premiers titres.