Cela fait bientôt 10 ans que les Nord-Irlandais de Trucker Diablo délivrent leur hard-rock gonflé à la testostérone. Pourtant "Fighting For Everything", leur nouvel opus, n’est seulement que leur quatrième méfait. Deux ans après "Rise Above The Noise", cet album est l’occasion de présenter le nouveau bassiste, Jim Mc Gurk qui prend la place de Glenn Harrison. Réputé pour son énergie et son authenticité, le quatuor peine cependant à franchir un nouveau palier, certains lui reprochant un manque d’originalité alors que d’autres semblent avoir du mal à s’y retrouver parmi ses influences.
Ces remarques, si elles ne sont pas totalement injustifiées, n’en sont pas moins déplacées pour plusieurs raisons. La principale vient du style pratiqué qui a toujours privilégié l’énergie et l’honnêteté par rapport à la nouveauté ou toute forme d’excentricité. Mais il semble cependant important d’insister sur le fait que Trucker Diablo n’en manque pas moins d’une identité propre. En effet, le quatuor semble vouloir tendre un pont entre les îles britanniques et l’Amérique du Nord en alliant la puissance d’un hard US qui sent l’huile de vidange, le soleil brûlant des plaines désertiques des états du sud des Etats-Unis, et quelques éléments typiquement celtes à l’image de ce que Thin Lizzy pouvait pratiquer à son époque. Et c’est peut-être dans ce grand écart que certains se perdent en ayant du mal à s’y retrouver entre des titres intégrant une grosse dose de mélodies (‘Let’s Just Ride’ et son potentiel de hit en puissance) et d’autres flirtant carrément avec le thrash metal (‘Die For You’, tornade destructrice au gros riff et au refrain cinglant).
Pourtant, en s’appuyant sur la voix velue de Tom Harte et sur des guitares bien grasses, l’ensemble reste cohérent, proposant quelques titres heavy aux refrains imparables (‘We Will Conquer All’, ‘Fighting For Everything’) et d’autres flirtant avec un gros hard rock à tendance mélodique digne de Nickelback (‘Over The Wall’, ‘Detroit Steel’). Le banjo est ressorti en introduction avant de balancer un bon gros riff US (‘Drown In The Fire’ aux accents Molly Hatchet et digne de ce que les Britanniques avaient déjà fait avec ‘Rattlehead’ sur "The Devil Rhythm"), tandis que la douce mélancolie celte, portée par un violon, vient se rappeler à notre bon souvenir sur ‘When The Waters Rise’ qui clôture ce déluge de feu et d’huile de vidange avec un peu de délicatesse.
S’il ne peut pas encore se targuer d’avoir offert un album incontournable, la faute à une production trop lisse pour un style qui mérite un peu plus de rudesse, Trucker Diablo n’en confirme pas moins qu’il faut compter avec lui dans le paysage du bon gros hard-rock qui tache et qui sent les dessous de bras. Comme pour les précédents opus du combo d’Armagh, ce disque est à se passer avec pour seule ambition de solliciter ses articulations et de partager un bon moment avec des potes autour d’un stock de bières en conséquence.