Après plusieurs années d'une errance relative, le voyant accoucher d'une poignée d'albums, de "God Says No" (2000) à "Mastermind" (2010), certes plaisants mais sans carburant ni folie, Monster Magnet a retrouvé les chemins d'une inspiration fertile avec "Last Patrol" que d'aucuns considèrent, à juste titre, comme une de ses offrandes les plus jouissives.
Alors que "Milking The Stars", révision psyché de son prédécesseur, semblait témoigner chez les Américains d'un goût retrouvé pour les ambiances enfumées de l'époque bénie de "Spine Of God" et "Dopes To Infinity" sans toutefois aller aussi loin que "Tab" dans le trip cosmique qui sent bon les herbes de Provence, "Mindfucker" renoue contre toute attente avec le stoner couillu de "Powertrip", le son surproduit en moins et la sobriété (à tous les niveaux) en plus. Bref, ayant remisé depuis longtemps leur prétention au placard, Dave Wyndorf et sa bande ne cherchent plus à devenir plus gros qu'ils ne peuvent l'être. C'est très bien ainsi.
Du coup, cette douzième rondelle incarne tout ce qu'on aime chez ce pilier du stoner sans être encombrée par ce qu'on n'aime pas chez lui, à savoir cette espèce d'arrogance qui sied mal à un genre que guident avant tout le plaisir et la simplicité. Le groupe du New Jersey a compris qu'il n'est jamais aussi bon que lorsqu'il crache du fuzz avec largesse, lorsqu'il balance la purée sur un lit moelleux d'effluves seventies. Enrobé d'un son bien gras, "Mindfucker" gravite pile poil entre la puissance de "Powertrip" et la gourmandise décomplexée de "Dopes To Infinity", entre les riffs qui font mal et les volutes duveteuses avec toujours ce sens du feeling qui sent sous les bras et de la mélodie humide et imparable.
Commandé par un grand Wyndorf, crooner sexy et imbibé, l'album est lancé par un 'Rocket Freak' nerveux à souhait, cependant vite effacé par les monstrueux 'Soul' qui s'achève sur un feu d'artifice fuzzy, 'I'm God', dont la force heavy qui brûle dans son bas-ventre ne freine en rien les envolées psyché, sans oublier l'énorme titre éponyme au tempo lourd et chaloupé. A cette première partie irrésistible succède une seconde parfois plus directe ('Ejection', 'Want Some') mais où Monster Magnet en profite pour aller visiter l'Orient ('All Day Midnight') et l'Amérique profonde ('Brainwashed') avant de conclure avec un 'When The Hammer Comes Down' comme échappé des années 90, pur joyau de stoner mordant et gonflé de guitares velues.
Fort de ses dix pistes bombastiques, "Mindfucker" confirme la bonne santé retrouvée de Monster Magnet, dernier survivant (ou presque) du stoner des glorieuses nineties.