En quelques années, l'excellence du travail de Pierre Le Pape a abouti à faire de chaque nouvel album de Melted Space un événement. Ce "Darkening Light" était donc attendu après un enchaînement d’œuvres de grande qualité et reconnues comme telles et dont la régularité calendaire est à souligner.
Malgré l'excellent niveau de "The Great Lie", un petit bémol avait émergé quant à la production un peu en retrait, ce qui oblitérait légèrement le plaisir énorme ressenti à son écoute. Ici, pas de défaut sonore. La production est résolument metal, avec un son en béton armé, des guitares surpuissantes, des voix fabuleusement mixées laissant apprécier la justesse de l'interprétation des nombreux intervenants. Les douze chanteurs invités sont, chacun dans leur style, remarquables. Clémentine Delauney (Visions of Atlantis) est simplement fabuleuse de lyrisme et de grâce, Le chant de Ailyn Giménez Garcia (Sirenia) est plus délicat et apporte une volupté qui tranche remarquablement avec la puissance rythmique. Les chants "extrêmes" de Black Messiah, Guillaume Bideau (Mnemic) ou Mikael Stanne (Dark Tranquility) font le parfait contrepoint et illustrent la part la plus sombre de l'âme qu'on devine torturée de Pierre Le Pape. Le point original est toutefois la présence de nombreuses voix féminines qui parfois s'entremêlent ainsi que la présence artistiquement et médiatiquement notable de Jeff Scott Soto (Soto, Sons Of Appolo...).
Sur le plan intrinsèquement musical, on a donc affaire à une certaine puissance soulignée par des guitares débordantes d'énergie. Dans une grande cohérence, Melted Space nous fait traverser divers continents musicaux au moyen d'une orchestration parfois dantesque ou discrète ou encore symphonique. On tutoie le metal prog véhément de Symphony X sur des riffs imparables, le power metal symphonique, du black/death mélodique et d'autres évocations variées tout en conservant un son homogène et d'une grande intensité. La variété est incontestablement une des forces de cet opus qui nous emmène dans un univers plutôt sombre mais loin d'être désespérant. La lumière jaillit en effet au détour d'un chant éthéré ou d'une cavalcade orchestrale. Le résultat est encore plus accrocheur que pour les albums précédents. Certains filons sont peut-être, de ce point de vue, exagérément exploités. Mais grâce à eux, l'auditeur est immédiatement happé dans des compositions qui parviennent à le tenir en haleine après plusieurs écoutes car on constate une grande profondeur et de la richesse dans la plupart des morceaux.
Difficile de prendre en défaut cette nouvelle œuvre grandiose de Pierre Le Pape qui gagne en cohérence et en efficacité. Les nombreuses voix sont sublimement utilisées dans leurs registres respectifs avec encore plus de très beaux chorus . Album à ne pas manquer.