Après des expérimentations pop ou electro, Gary Moore est revenu au blues en 2001 avec le bien nommé "Back To The Blues". Avec "Power Of The Blues", il avait intégré quelques éléments hard-rock à son blues-rock pour un résultat surprenant sans être déroutant. Le voici de retour avec un "Old New Ballads Blues" qui ne laisse que peu de doutes quant à son contenu. Enregistré avec Don Airey qui a fait quelques infidélités à Deep Purple pour épauler son vieil ami, cet album continue donc de creuser le sillon d’un style au sein duquel Gary Moore s’épanouit totalement et qui lui a apporté ses plus grands succès. Le talent de l’Irlandais étant immense, le plus dur pour ce dernier reste d’intégrer un nouvel intérêt à la découverte de chaque nouvelle production.
Il est vrai qu’à la lecture du titre de cet opus et de sa tracklist, la question de ce fameux intérêt se fait prégnante. Deux nouvelles reprises et deux morceaux déjà présents sur "Still Got The Blues" en 2006, cela fait quand même beaucoup pour le Old et laisse au New une place réduite. L’écoute des deux relectures que sont ‘Midnight Blues’ et ‘All Your Love’ laisse d’ailleurs dubitatif tant elles sont proches des versions de 2006. La première est un peu plus épurée et la seconde plus root, mais il n’y a pas là de quoi se relever la nuit pour se passer ces nouvelles versions. Quant à l’exercice de la cover, Gary Moore s’y est déjà penché à plusieurs reprises avec talent et succès, mais n’y aurait-il pas dans cette pratique une forme d’enfumage pour masquer un certain manque d’inspiration ?
C’est possible, mais il faut également reconnaître que le maître n’a pas son pareil pour s’approprier d’anciens titres. Il suffit d’écouter son jeu de wah-wah balançant d’un écouteur à l’autre sur l’énergique et léger ‘Done Somebody Wrong’ d’Elmore James pour rapidement baisser les armes et abandonner ses velléités de reproches. Quant à ‘I’ll Play The Blues For You’ (Jerry Beech), elle dégouline d’un feeling urbain et nocturne qui fera fondre les plus réfractaires. Entre-temps, le génie de la six-cordes aura balancé quelques nouvelles compositions qui auront fait leur effet comme un ‘Ain’t Nobody’ aux couplets reptiliens et alternés avec les saillies d’un refrain imparable et de soli lumineux. Et puis il y a l’exercice de la ballade dont le guitariste use mais n’abuse jamais tant il maîtrise cet art. La mélancolique ‘Gonna Rain Today’ voit les larmes couler de chaque note de guitare, alors que ‘Flesh & Blood’ flirte avec des territoires popisants mais gorgés d’émotions avec un refrain totalement envoûtant. A noter également l’instrumental ‘Cut It Out’ à la mélodie obsédante.
Bien que laissant un léger goût d’inachevé en raison de la présence de titres qui semblent être là pour masquer un petit manque d’inspiration, cet opus n’en est pas moins une nouvelle démonstration du talent sans limite de son interprète. Peu de guitaristes sont capables de transmettre un tel concentré d’émotions à chaque intervention et le parcours de l’Irlandais ne fait que renforcer l’admiration qu’il déclenche. Il reste à souhaiter que le prochain album évite les titres dispensables pour continuer d’imposer le maître sur son piédestal.