Galahad a des choses à dire. Pour son nouvel opus "Seas of Change", il s’empare d’un sujet épineux, le Brexit. Mais plutôt que d’émettre un avis tranché pour/contre, le groupe choisit d’en faire une parabole sur les incertitudes. Sujet complexe oblige, ce qui n’était au départ qu’un morceau de sept minutes a évolué en une grande pièce épique de près de 43 minutes, partagée en douze chapitres enchaînés.
Nombreux ceux qui se sont cassés les dents sur ce genre de travail périlleux.
Après un "Quiet Storms" acoustique qui a partagé l’opinion, Galahad revient vers un progressif dynamique et emphatique qui nous avait emballés dans "Empires Never Last", en y mettant tout son savoir-faire et en développant une remarquable diversité d’ambiances. La formation a subi un léger glissement dans sa composition, Lee Abraham passant de la basse à la guitare, et Tim Ashton retrouvant le poste de bassiste qu’il avait occupé en 1991 à l’occasion du tout premier album de Galahad, "Nothing Is Written". Le mastering a été confié à Karl Groom, qui avait fait des merveilles, entre autres avec le récent "Unquiet Skies" d’Arena.
Le résultat est au-delà des espérances : le quatuor livre une prestation impeccable, porté par une section rythmique précise et un Stuart Nicholson très convaincant qui joue entre sensibilité et théâtralité avec un bel équilibre. Ce sont les claviers qui sont à la manœuvre, Dean Baker utilisant une très large palette sonore, des nappes planantes (‘Storms Are Coming’) aux sons electro (l’intro de ‘Up In Smoke’), faisant passer les ambiances du tranquille au plus heavy avec une fluidité remarquable : la composition révèle en effet des transitions extrêmement soignées, soit par des breaks judicieux qui suggèrent l’incertitude, soit par des passages atmosphériques plus éthérés (le début de ‘Sea of Uncertainty’).
Galahad a eu l’intelligence de faire appel à Sarah Bolter (flûte, sax soprano, hautbois) pour apporter une touche organique très appréciable.
Malgré sa durée, ‘Seas of Change’ ne souffre d’aucun temps mort ni d’aucune longueur. Les amateurs de morceaux à tiroirs se régaleront de rappels de thème et de la multiplicité des arrangements qui viennent astucieusement enrichir le propos. Comme pour tout bon morceau épique de prog, la fin est le pendant symétrique de l’introduction : cerise sur le gâteau !
Ce morceau foisonnant et passionnant est complété par deux remix qui visent surtout à remettre la guitare à l’honneur, un bonus qui sans être mauvais pâtit forcément de la comparaison avec le morceau-titre. Avec "Seas of Change", il semble bien que Galahad ait réussi son Grand-Œuvre : à ne manquer sous aucun prétexte !