Mais qu’ont-ils donc tous à être hyperactifs dans le milieu du blues-rock ? Il n’y a qu’à regarder le nombre d’albums au sein de différents projets et toutes les participations de Joe Bonamassa ou Warren Haynes pour se poser la question. Mais à quoi carburent-ils ? Et si c’était tout simplement à la passion de leur art ? A côté des artistes déjà nommés ou d’un Walter Trout, il faut également citer Lance Lopez. Alors que le dernier opus de Supersonic Blues Machine ("Californisoul" - 2017) n’est sorti qu’il y a quelques mois, voici déjà un album solo du chanteur-guitariste texan. Si le bonhomme est professionnel depuis l’âge de 14 ans et qu’il a intégré le groupe de Lucky Peterson à 18 ans, cela fait peu de temps qu’il commence à obtenir la reconnaissance qu’il mérite. Avec ce "Tell The Truth" autobiographique et introspectif, il frappe un grand coup et va sans aucun doute marquer les mémoires.
Produit et enregistré sur trois ans à Los Angeles sous la houlette de Fabrizio Grossi, le nouvel opus fait partie de ces œuvres à la profondeur rare qui, à l’image du "Battle Scars" de Walter Trout, voit l’artiste se livrer sans artifice avec une authenticité à la hauteur du talent d’interprétation. N’allez cependant pas croire que Lance Lopez se met en spectacle comme dans un one-man show, car l’humanité de son œuvre se retrouve dans son attitude envers les musiciens qui l’accompagnent. Il n’y a qu’à voir le nombre d’interventions de
l’harmonica rutilant de Jimmy Z. et des claviers d’Eric Scortia pour s’en rendre
compte. Si les compositions se nourrissent de la vie et des expériences du leader, nous avons bien affaire à un véritable groupe dans lequel même les soli de guitares sont partagés par le maître des lieux avec son compère Wes Jeans.
"Tell The Truth" est typiquement le genre d’album qui doit s’aborder dans son intégralité pour prendre toute sa valeur. De ‘Never Came Easy To Me’, blues-rock graisseux et accrocheur qui dévoile la philosophie d’un Lance Lopez qui a dû s’accrocher et accepter de faire face aux difficultés de la vie pour en arriver où il se trouve, au rouleau compresseur d’un titre éponyme au riff et au refrain obsédants, l’auditeur passe par différentes étapes laissant découvrir l’âme de l’artiste. L’élève de Johnny Winter et Billy Gibbons narre les tentations qui se sont offertes à lui (‘Down To One Bar’ à l’énergie hard-rock, et ‘High Life’ au groove rappelant Ben Harper ou Lenny Kravitz), assume ses origines sudistes en lorgnant vers un heavy-rock à la Lynyrd Skynyrd (‘The Real Deal’), et s’aventure même à quelques clins d’œil appuyés au plus grands. ‘Cash My Check’ fera penser au meilleur des Rolling Stones, ‘Back On The Highway’ se lance sur un riff rappelant fortement celui du ‘Bad Boy Boogie’ d’AC/DC, et ‘Blue Moon Rising’ dégage un feeling envoûtant digne de Jimi Hendrix. Tout cela reste très personnel, la preuve en étant la reprise hyper puissante et catchy du ‘Mr. Lucky’ de John Lee Hooker.
En mettant son âme et son cœur sur la table, Lance Lopez offre un album à l’intensité rare qui prouve le talent d’un artiste authentique et sans artifice. "Tell The Truth" fait partie de ces œuvres qui prennent leurs racines dans la vie des classes laborieuses du pays de l’oncle Sam. Mêlant la rudesse des situations à la profondeur des émotions, chaque titre touche l’auditeur en plein cœur et ne peut laisser personne indifférent. C’est officiel, après un chemin ardu et besogneux, Lance Lopez a enfin atteint les sommets du genre et la reconnaissance qu’il mérite.