Quoi de neuf en 2018 du côté de Monnaie de Singe ? Un nouvel album, seulement (si l'on considère le rythme précédemment adopté par le groupe !) trois années après le remarquable "Error 404" qui avait vu une nette évolution du propos des Auvergnats. "The Last Chance" vient confirmer les orientations prises à l'époque, puisqu'outre la totalité des textes chantés en anglais, on retrouve comme principale et quasi-unique interprète la voix féminine d'Anne-Gaëlle Rumin, Philippe Glayat – chanteur historique du groupe – ne s'exprimant que sur un seul titre.
"The Last Chance" est un album concept, traitant de la destruction actuelle de notre planète par l'homme et de la possibilité d'une dernière chance pour assurer la pérennité de notre espèce, consistant à rejoindre un ailleurs au-delà de notre galaxie. Sujet particulièrement sombre s'il en est, et que l'on retrouve dans la couleur musicale de l'album qui privilégie les atmosphères lunaires et des tonalités on ne peut plus mineures.
L'ouverture procurée par 'I Am', qui met en opposition ce que la Terre devrait être ('I Am') et ce que l'homme lui fait subir ('I Am not'), trouve d'entrée la bonne formule avec des claviers planants soutenus par une rythmique mid-tempo portée par la frappe lourde d'Eric Fargès et des saillies de guitare qui nous enrôlent dans une ambiance post-rock dominée par la voix mutine et parfois désabusée d'Anne-Gaëlle Rumin, et qui colle à merveille au concept. Cette tendance va accompagner l'auditeur pendant la majeure partie des 10 titres de l'album, avec néanmoins quelques variations de styles qui introduisent de nouveaux éléments.
C'est tout d'abord 'The Last Chance', point central de l'histoire, qui alterne séquences inquiétantes et un refrain teinté d'espoir, pour ce qui est probablement le titre le plus progressif de l'ensemble et au sein duquel on ressent toute la richesse apportée par les deux guitares. Et puis, le court 'December 3003' qui nous propose un ton plus léger, là encore en phase avec le sujet de la chanson, limite pop avec des guitares aériennes qui enjolivent les 160 secondes de ce morceau que l'on pourrait presque qualifier de single idéal !
Dans un mode moins consensuel, 'My Lucky Stars' sonne plus dépouillé, avec ses guitares rythmiques tranchantes et son refrain limite irritant. Et dans toute cette frénésie, on en oublierait presque 'Not Under Fifty' et sa voix masculine qui, aussi étrange que cela puisse paraître, se révèle moins accrocheuse, moins 'forte' dans le sens porteuse de message, que celle de sa consœur. C'est enfin par un 'Happy Birthday' légèrement décalé par rapport à l'ensemble que MDS conclut son histoire, titre efficace à la tonalité désabusée et doté d'un final magistral où le rythme s'accélère, et que j'aurais souhaité pour ma part un tantinet plus long dans sa séquence instrumentale terminale.
Un dernier mot enfin pour souligner la qualité de la production, avec notamment un bon équilibre entre les instruments et les voix, contribuant là encore à la bonne immersion de l'auditeur dans les atmosphères voulues par le groupe.
Avec cette cinquième production, Monnaie de Singe continue de tracer sa route et de faire évoluer son style, désormais quelque peu éloigné de "La Vie de Rose", tout en confirmant avec brio et élégance les qualités précédemment soulignées à l'écoute de "Error 404". "The Last Chance" est à déguster tranquillement, au fil d'écoutes répétées qui permettront de s'imprégner de son histoire et des ambiances qui s'en dégagent. Puissent ces 55 minutes toucher le plus grand nombre d'entre nous et amener chacun à réfléchir un peu plus sur le présent que nous vivons et ce futur proche que nous dégradons un peu plus chaque jour.