La Norvège serait-elle l'autre pays du néo prog à tendance atmosphérique à l'image de la Hollande qui est l'autre pays du fromage ? Avec des noms tels que Soup, Holon, Oak et Airbag dont Bjorn Riis est l'un des piliers, le pays nordique est en passe de devenir le nouvel Eldorado d'un style bien singulier exploitant notamment à son paroxysme l'aspect mélancolique exacerbé et, au fond, une certaine tristesse latente hivernale.
"Coming Home" est un EP qui sort sept mois presque jour pour jour après le très réussi "Forever Comes To An End" et dont il représente le pendant y compris dans l'artwork. L'album de 2017 représentait en effet une femme de dos qui avançait dans la mer pour s'y noyer peut-être. Pour cet EP, c'est un homme et son enfant qui regardent, vus de dos, de l'intérieur d'une maison l'extérieur en contre-jour. Cette symbolique revêt-elle l'espoir de revoir cette femme, cette épouse, revenir dans le foyer familial ? La rupture est donc un thème cher à Bjorn qui l'illustre de façon jusqu'au-boutiste dans son œuvre tant artistique que musicale.
Comme souvent l'ambiance se veut très mélancolique, sombre et remplie d'un spleen à la Baudelaire puis elle devient plus lumineuse grâce aux solos de guitare gilmouriens finaux dont Bjorn a le secret. L'artiste prend donc le temps d'installer l'humeur et les sentiments au terme de quatre titres inédits et d'une relecture du titre éponyme de son premier album solo. L'auditeur ne sera pas surpris dans cet EP qui reprend l'histoire là où l'album précédent s'était arrêté en adoptant le même style, parfois un peu plus pop et acoustique ('Coming Home') ou ambient et minimaliste ('Daybreak'). Comme un point final à cette tranche de vie, Bjorn fait à nouveau appel à Sichelle Mcmeo Aksum (déjà présente dans le titre 'Winter' de l'album précédent) sur 'Drowning' pour un nouveau duo délicat construit un peu à la Anathema. "Coming Home" finit sur une nouvelle version de 'Lullabies In A Car Crash' plus concise que la version originale et qui gagne étonnement en intensité et en profondeur.
Il pourra être reproché au guitariste de prendre peu de risques dans cet EP qui aurait pu être l'occasion d'être un laboratoire pour tester d'autres évolutions, d'aller plus loin dans l'exploration de son talent de mélodiste, voire d'apporter quelque chose de plus positif. Il n'en est rien car contextuellement il constitue la conclusion de l'histoire entamée précédemment. Il faudra attendre le prochain album pour se prononcer sur la faculté de l'artiste à se renouveler. Cela ne remet pas en cause cette volonté de partager la sensibilité à fleur de peau d'un artiste hors du commun au toucher de guitare qui n'a rien à envier à son maître.