Cela fait quelques années que le projet d’un album de reprises trainait dans un coin de la tête des Poodles. Concrétiser cette idée trois ans après un "Devil In The Details" qui laissait déjà fortement apparaître un manque d’inspiration semble néanmoins une prise de risque inconsidérée. L’exercice de l’opus de covers peut rapidement se révéler casse-gueule et avec "Prisma", les caniches suédois tentent un grand écart aussi bien au niveau des époques abordées que des styles musicaux. Faire cohabiter David Guetta et Deep Purple sur le même album a peu de chance de laisser beaucoup de monde indifférent.
Dans le genre fourre-tout, The Poodles y sont allés gaiement et l’auditeur aura du mal à y retrouver ses petits, au point qu’il est presque impossible de présenter cet opus de manière organisée et structurée. Allez mettre de l’ordre dans un mélange de dance music de DJ (‘Love Is Gone’ de David Guetta), de pop scandinave (‘Don’t You Worry Child’ de Swedish House Mafia), et de hard-rock 70’s (‘Soldier Of Fortune’ de Deep Purple). D’autres approches auraient été envisageables, comme celle de faire le tri entre les versions respectant plus ou moins les originaux et celles se voyant injecter une bonne dose de personnalité, mais là-aussi, il y a vraiment à boire et à manger. Dans la première catégorie par exemple, la version énergique et captant la folie du ‘Crazy Horses’ de The Osmond se retrouve rapidement effacée par un ‘Goodby Yellow Brick Road’ d’Elton John tellement respectueux qu’il en devient fade.
Mais c’est particulièrement dans leurs tentatives de personnalisation que Jakob Samuel et sa bande se plantent dans les grandes largeurs. A ce titre, les Suédois se plombent dès le début d’album avec la version plate et sans saveur du ‘Maniac’ de Michael Sembello (bande originale de Flashdance), le ‘Love Is Gone’ de David Guetta, qui prouve qu’un étron restera un étron même en essayant d’en changer les ingrédients, et le ‘It’s No Good’ de Depeche Mode qui transforme un petit bijou de darkwave en un plat lourdaud et indigeste. La version hard-rock du ‘Call Me’ de Blondie accroche au départ avec sa guitare rutilante mais tourne vite en rond après un passage en voix de fausset ridicule sur le break, et seule l’approche folk du ‘Soldier Of Fortune’ de Deep Purple réussit réellement à sauver les meubles.
Malgré une fin d’album qui sort un peu la tête de l’eau, ce "Prisma" se révèle donc un naufrage qui semblait déjà s’annoncer trois ans auparavant. Ne réussissant pas à régler leur curseur entre respect des originaux et personnalisation, ni à dégager de réelle ligne directrice à l’ensemble, les Suédois finissent par ne laisser que le goût d’un gâchis sans nom. Sans un sursaut urgent et indispensable, la fin de The Poodles risque de se révéler brutale et sans appel.