Après quinze ans d’existence et sept albums au compteur, les Américains de Between The Buried And Me se sont laissé tenter par le double album découpé en deux parties courtes éditées à quelques mois d’intervalle. Et si les rêves devenaient une marchandise comme les autres ? Que se passerait-il si autrui pouvait consommer les songes d’un autre et s’en divertir ? Telle est l’idée originale du conceptuel "Automata" qui voit sa première partie sortir en mars et la seconde en été.
BTBAM n’a jamais fait dans la simplicité et une fois de plus le degré de complexité est particulièrement élevé. "Automata I" développe un metal hybride pouvant à la fois déverser une violence abrasive dans une économie mélodique, comme dans les premiers travaux mathcore du groupe (‘Condemned to the Gallows’ ou le sombre ‘House Organ’), que cultiver sa propension aux contrastes marqués avec des passages dans lesquels les growls colériques côtoient les chants clairs les plus éthérés (‘House Organ’, ‘Yellow Eyes’ qui a des parentés avec Dream Theater dans la façon de débuter le morceau) et des séquences planantes et calmes pour contrebalancer les saillantes variations rythmiques et thématiques (‘Millions’).
De la même manière "Automata I" montre une forme de structuration avec l’irrésistible et léger 'Millions', mais verse aussi dans la grande confusion avec le très débridé 'Yellow Eyes' dans lequel les bonnes idées peinent à émerger du tourbillon de changements directionnels. Le final ‘Blot’ (sorte de mix entre l'orientalisme du ‘Home’ de Dream Theater et certaines inspirations atmosphériques de Haken) et ses dix minutes parviennent partiellement à offrir le meilleur dont est capable BTBAM en termes de finesse et de musicalité à cause d’assemblages un peu grossiers alors que les mélodies de refrains sont bien travaillées et que la partie atmosphérique centrale est plus généreuse émotionnellement.
"Automata I" affiche un BTBAM instinctif qui abonde dans l’énergie au détriment d’une partie de ses atouts et notamment dans les riffs manquant de créativité, les jonctions à gros traits ou les apports harmoniques plutôt modestes. Comme d’accoutumée il aura fallu plusieurs écoutes pour se familiariser avec le contenu très dense du disque mais à l’inverse de "The Great Misdirect" ou de "Coma Ecliptic", pour lesquels cette discipline s’avérait éclairante sur de nombreuses trouvailles passées inaperçues dans les premiers temps, "Automata I" se livre plus facilement que pour les autres méfaits du groupe et ne révèle aucune véritable surprise ou coup de maître au fil des découvertes, même si certains refrains se font plus entêtants. "Automata I" séduira les amateurs de la composante la plus virtuose et spontanée de BTBAM. Pour les esthètes il faudra peut-être attendre "Automata II".