Fort du succès de son troisième album sorti il y a seulement treize mois, The Night Flight Orchestra revient donner une suite à son excellent "Amber Galactic" avec toujours le même line-up de fidèles nostalgiques d'une époque musicale adorée et en reprenant l'iconographie de la femme prête à affronter les couloirs du temps. Le titre de ce nouvel album donne la clé de la dimension intergalactique des deux derniers albums du groupe suédois en affirmant que le monde, parfois, ne suffit pas.
Les deux albums ayant un intervalle de sortie relativement court, il y a forcément un lien fort entre "Amber Galactic" et "Sometimes The World Ain't Enough". Ce dernier est la suite temporelle logique de son aîné et d'une certaine manière du parcours global de Night Flight Orchestra puisqu’à la double composante 70's-80's qui caractérise "Amber Galactic", "Sometimes The World Ain't Enough" ne conserve essentiellement que la tonalité des années 80. Ainsi, l’entraînant 'This Time' joue parfaitement son rôle d'interface entre les deux disques avec son riff hard rock et son passage solo piano-guitares qui ramènent directement à Deep Purple alors que son développement fait basculer le titre dans la décennie des Toto et Journey. Justement c'est le langage soft rock et FM de ces formations qui vient à l'esprit à de nombreuses reprises dans ce disque, par exemple dans 'Turn To Miami' dont l'introduction fait malicieusement référence au générique de la série phare des années 80, le début au piano de 'Sometimes The World Ain't Enough', 'Can't Be That Bad' et ses chœurs harmonisés ou les ballades classiques 'Moments Of Thunder' aux amples arrangements, et 'Lovers In The Rain' à l'arrière-goût un peu kitch.
On ne peut pas mentionner la musique populaire des années 80 sans faire un détour vers la pop aux accents disco et funk, et Night Flight Orchestra ne fait pas l'impasse. Dans cette catégorie il y a le dansant 'Paralyzed' au refrain sans doute le plus entêtant de l'album ou 'Pretty Thing Closing In' aux phrasés de guitare typiques du genre. Night Flight Orchestra aborde une décennie musicale riche dans laquelle le rock progressif n'a pas été totalement étouffé par toutes les modes émergentes de l'époque. Les Suédois rendent hommage à leur manière au progressif dans un final de près de dix minutes qui démontre tout le talent technique des musiciens de l'orchestre et prouve toute leur maîtrise de la composition plus exigeante tout en restant parfaitement fluide et dans le ton d'un album à la couleur légère et festive. Comme pour "Amber Galactic", l'écoute de "Sometimes The World Ain't Enough" ne fait jamais l'effet d'un mauvais pastiche. L'amour et le respect des musiciens pour cette époque musicale s'entendent à chaque seconde, au premier rang desquels Bjorn Strid à la voix plus que jamais plastique pour sonner d'époque (les aigus de 'Barcelona', sa fragilité dans les refrains de 'Pretty Thing Closing In') et on ne peut que s'incliner devant la sincérité et l'authenticité déployées ici.
Certes l'effet de surprise provoqué par "Amber Galactic" est difficile à retrouver un an après avec un "Sometimes The World Ain't Enough" aussi bon soit-il. Mais le Night Flight Orchestra ne nourrit pas sa démarche avec l'ambition mercantile de surfer sur l'effet du revival très en vogue ces derniers temps et pense judicieusement son évolution en proposant un disque en totale connexion avec son aîné. Encore plus accessible que son devancier, ce nouvel album devrait convertir de nouveaux adeptes au divertissement jubilatoire de The Night Flight Orchestra qui une fois de plus joue juste et restitue à merveille l'esprit de toute une époque.