Petit à petit, à son rythme, lent (forcément), Witchsorrow a fait son trou parmi les solides artisans du doom. Après avoir enfanté avec "No Light, Only Fire" ce que d'aucuns considèrent comme son offrande la plus aboutie à ce jour, le trio se devait de ne pas décevoir au moment de se délester de son successeur.
Encore une fois publié par Candlelight Records, "Hexenhammer" ne pourra qu'épancher notre soif jamais rassasiée en enclumes sabbathiennes. A l'heure où le genre est, à l'instar de son cousin le black metal, travaillé de l'intérieur par des mutations le poussant dans une voie de plus en plus mortifère ou ténébreuse, qu'il est bon de pouvoir déguster un doom d'une pureté d'airain certes tellurique mais qui n'oublie jamais d'où il vient, enfant bâtard du heavy metal.
Héritier de Cathedral pour son énergie parfois groovy et d'Electric Wizard pour le chant du guitariste Nekroskull (ça ne s'invente pas !), avec lesquels il partage également ce même goût pour une sorcellerie hammerienne, Witchsorrow ne cherche donc nullement à révolutionner le credo, préférant au contraire réciter une messe séculaire à base de psaumes coulés dans le plomb des aciéries de la Perfide Albion. Classique dans la forme comme dans le fond mais ô combien jouissif, ce quatrième opus n'en constitue pas pour autant une resucée de ses prédécesseurs.
Si ces derniers épousaient la forme massive de blocs pétrifiés aux ramifications tentaculaires, "Hexenhammer" s'articule quant à lui autour de compositions plus trapues qui ne franchissent même jamais la barre des dix minutes au compteur, fait suffisamment rare chez les Anglais pour être souligné. Bien sûr, le titre éponyme, 'Eternal' et surtout le terminal et mythologique 'Like Sisyphus' voisinent avec cette durée mais le reste, à savoir les trois autres pistes (sans compter la courte intro), se montrent plus directs, laissant des racines quasi NWOBHM affleurer à la surface ('The Devil's Throne').
S'ils ne sont parfois pas loin de galoper, comme au beau milieu du déjà cité et solennel 'Eternal', les Britanniques n'en ont pas moins les pieds englués dans un sol épais dont ils ne se libèrent qu'en de rares instants. La basse sismique de la petite Emily Witch et la batterie aux allures de bathyscaphe de David Wilbrahammer se chargent de faire trembler les murs ('The Parish'). Seul le manche du chanteur, quand il se lance dans de brefs soli, creuse dans la nuit des tranchées nébuleuses du plus bel effet, témoin le final onctueux de 'Demons Of The Mind'.
Si son menu se révèle en définitive assez nerveux, l'album s'achève toutefois sur sa plainte la plus viciée dont la lourdeur pachydermique est à peine altérée par une brutale accélération et une ambiance hantée aux confins d'un psychédélisme occulte. Witchsorrow ne pouvait trouver meilleure façon de fermer la porte de ce "Hexenhammer" grondant d'une beauté pure et sentencieuse.