A voir les trois têtes de mort peu engageantes qui ornent la pochette et le titre de l'album, "Ritus", le chaland peu avisé pourrait penser que le nouvel album de Florian Grey est d'obédience death metal. Grande serait alors sa déception à l'écoute de ce disque, pour peu qu'il soit sensible à ce style musical bien évidemment. Mais si vous n'êtes pas friands de distorsions de guitare, growls et autres blast beats, alors ne vous laissez pas décontenancer par la pochette macabre qui n'a que peu de relation avec le contenu.
Car "Ritus" ne recèle rien qui puisse effaroucher les oreilles les plus sensibles. Si sa musique ne manque pas d'une belle énergie impulsée par une batterie souvent appuyée doublée d'une basse véloce, si ses ambiances sont plutôt assombries par des riffs de guitare pesants et un chant grave et mélancolique, l'album reste facile à appréhender tant le format des chansons est des plus classiques et les mélodies conventionnellement agréables.
L'ensemble forme un curieux mélange de dark rock, heavy metal, new wave, pop des années 80 et même musique électronique. Une mixture qui constitue à la fois le point fort et le point faible du disque : d'un côté l'auditeur navigue un peu entre ces différents styles, ce qui lui évite de s'ennuyer, mais d'un autre le fait de passer de titres assez sombres ou lourds à d'autres très Top 50, sans parler de l'incursion dans le rock planant, dégage une impression de décousu.
Ainsi si 'Bluecifer', 'Until We Go Down', 'Bereft' ou 'Relief', les morceaux à la fois les plus énergiques et les plus convaincants, ressemblent au croisement des Doors et d'Alice Cooper, 'My Babylon', 'Glimmer' ou 'The Unknown Pleasure', leurs rythmes dansants et leurs synthés aigrelets, renvoient à la new wave d'un Depeche Mode ou d'un Alphaville vaguement teintée d'un AOR façon Asia. Complété par un titre électronique anecdotique à la Tangerine Dream ('Paraphrase'), une ballade passe-partout ('A Cold Days Night') et un titre accouplant un thème hymnique à des bruitages expérimentaux sans grand intérêt ('Catharsis'), "Ritus" ressemble à un melting-pot un peu bancal.
L'album s'écoute agréablement, notamment grâce à la voix de Florian Grey, charme majeur de "Ritus" avec son timbre grave et sa façon posée contrastant souvent avec l'énergie du trio guitare/basse/batterie, le différenciant de nombre de ses contemporains. Mais son ambiguïté stylistique empêche toute immersion et finalement tout attachement pour ce disque trop dispersé.