A la fin des années 60, les Charlots s´étaient amusés à interpréter une chanson humoristique 'Y´a Plus D´ Vodka', qui faisait la part belle aux jeux de mots à consonance soviétique. 40 ans plus tard, quelques dissidents décident de s'inspirer de l´idée à l´échelle d´un album au nom aussi exotique que pragmatique "Marx Attack", faisant suite à un premier qui avait bien surpris son monde ("L´Internationale").
Soviet Suprem est une troïka constituée de Sylvester Staline (ex Java), John Lénine (La Caravane Passe) et d'amis musiciens aux noms exotiques. "Marx Attack" repose sur une alchimie entre des instruments folkloriques et de froides boucles analogiques, le tout sur des rythmiques hip-hop : l'ordinateur allié à une impressionnante panoplie folklorique (balalaïka, violon, accordéon...), un projet apparenté aux Rois de la Suède qui malgré leur nom se sont emparés d´un son balkanique. L'objectif est ici simple : nous enchaîner sur les dancefloors comme le précise ´Diktator Du Dancefloor´, qui résume les grandes lignes du parti. Comme prévu, l´humour n´est jamais en retard. ´Post-Soviet´ (les réveils difficiles après la chute de la CEI), ´Couic Couic´ (qui considère les Révolutionnaires de 1789 comme des Rouges et les nobles comme les odieuses têtes du Capital qu´il faut faire tomber - avec au final un hilarant et cynique chœur de fillettes), ´Valse Soviet´ et son flow infernal ou encore ´Vladimir´ plus satirique que les autres : la chanson est un faux hommage au Tsar des temps modernes avec son refrain aussi crypté que drôle (Vladimir est un grand con...quistador!). Par ailleurs, chapeau bas à ce groupe qui a réussi la blague suprême que nous n´aurions osé imaginer dans aucune de nos pensées les plus folles : ressusciter Laroche-Valmont, auteur de l´inénarrable ´T´as Le Look, Coco´ pour une réécriture désopilante de son tube à la sauce Mao.
Mais malgré toute cette énergie communicative et le caractère marrant du projet, les paroles apparaissent parfois indigentes et répétitives. L´écriture n´est souvent composée que d´une accumulation de jeux de mots qui à la longue finiront par vous faire prendre les blagues Carambar pour du Raymond Devos, à l´image de ´1917´ dont les lyrics sont une compilation un peu lourde de tous les endroits à conquérir. En outre, l´album est contaminé par un son balkanique, un peu étonnant par rapport au thème choisi, qui fait penser que ce projet n´est qu´une continuité déguisée de La Caravane Passe (´Russian Kiss´ confirme cette tendance). Sur ce terrain déjà occupé par Les Rois de la Suède, Soviet Supreme n´est pas comme un poisson dans l´eau.
"Marx Attack" a tout de l´OSNI (Objet Sonore Non Identifié) avec sa volonté de remettre l´Internationale sur les dancefloors. Cependant le groupe aurait gagné à écrire de véritables chansons et s´intéresser plus précisément au folklore russe. On passera toutefois de bons moments de rigolade et nul doute que nos amis puissent être décorés de l'ordre de Lénine (Leningrad Cowboys bien sûr) pour les services rendus à la batterie. Moralité : la révolution n´est pas un dîner de gala, elle est au bout de la folie.