Pour sa quatrième livraison, et en théorie ultime volet de sa trilogie devenue tétra, le duo Seven Reizh formé par Claude Mignon et Gérard Le Dortz nous délivre une nouvelle œuvre d'art. Suite de "La Barque Ailée", "L'Albatros" termine la narration des aventures de Jean-Marie Lebris, l'album étant accompagné du deuxième volume du roman venant prendre sa place à côté du premier tome au sein d'un coffret superbement illustré. Ces livres sont bien évidemment les compagnons indispensables des CD et forment un tout indissociable.
Au niveau de la musique, les habituels ingrédients du groupe, portés une nouvelle fois par une pléiade d'invités, vont très vite se mettre en place et ce dès la courte entame proposée par 'Le Pavillon Chinois' : introduisant un des thèmes marquants de l'album, ce premier titre nous convie à une première symphonie celtique où la voix toujours aussi suave de Bleunwenn côtoie les instruments celtiques traditionnels, Uillean pipes et flûte en tête de gondole.
Après cette entame, Seven Reizh va dérouler des titres où la narration prend beaucoup de place, le plus souvent sous une forme assez intimiste, portés par des rythmiques assez lentes ('Brizh', 'Klasker-Bara'), parfois même avec une touche mystique introspective qui rappelle les travaux en solo de Lisa Gerrard ('Brizh'). Mais l'esprit progressif affirmé de Claude Mignon fait que l'ensemble ne se contente pas de ce modèle et la plupart des titres vont quasi-systématiquement évoluer vers des séquences instrumentales où l'on retrouve comme à l'accoutumée des effluves floydiennes marquées, des ambiances façon Alan Parsons Project, un peu de cloches tubulaires (final de 'Er Lein'), le tout mixé avec force bagad et autres sonorités world. Le mélange s'avère toujours toujours aussi réjouissant, d'autant plus lorsqu'il s'accompagne de thèmes mélodiques de toute beauté ('Er Lein').
Du côté des interprètes, nous retrouvons les désormais habituels Bleunwenn et Farid Aït Siameur, pour des duos bretons/kabyles toujours aussi étonnants ('Tiqit Weman') tant dans l'expression lyrique que dans le contraste formé par la voix féminine toute en rondeur et volupté et celle du chanteur de Tayfa souvent à la limite de la rupture, notamment dans les aigus ('Er Lein'). Et pour les progueux purs et durs qui n'auraient pas suffisamment tendu l'oreille pour dénicher toutes les subtilités des différentes compositions et de leurs arrangements travaillés, nous ne pourrons que leur conseiller de jeter une oreille plus qu'attentive à l'ensemble, et plus particulièrement au superbe 'Dalc'h Mad', lente procession à la rythmique binaire montant progressivement en puissance, pour délivrer un final de toute beauté par la grâce d'un duo violon/guitare aux accents déchirants.
Ce quatrième opus de Seven Reizh est un petit bijou posé dans son écrin, et qui demande une grande attention lors de son écoute pour en capter toutes les subtilités et surtout toutes les émotions. Opus conclusif d'un travail démarré il y a près de 20 ans, il se termine par un sifflotement de contentement, comme l'assurance d'un travail bien fait. C'est le moins que l'on puisse en dire !