Une des raisons pour lesquelles nous n'avions aucune nouvelle de la part de Symphony X, trois ans après le réjouissant "Underworld", doit être à chercher du côté du cerveau du groupe Michael Romeo, occupé à écrire et enregistrer son deuxième album solo. Voilà vingt-quatre ans que le virtuose n'avait pas écrit de musique sous son nom, de fait on comprend la priorité qui est la sienne de donner une suite à "Dark Chapter". Et ce n'est pas un mais deux albums qui sont au programme avec "War Of The Worlds" au concept nourri de l’œuvre de H.G. Wells dont la première partie sort au milieu de l’été.
"Dark Chapter" et ce nouvel album différent radicalement dans leurs contenus car si le premier est tout instrumental "War Of The Worlds / Pt. 1" a plus à voir avec ce que l'Américain compose pour Symphony X. Effectivement, l'amateur des derniers méfaits de Symphony X, à savoir des compositions plus metal et moins progressives, sera ici en terrain conquis et pourra se sustenter avec une collection de titres qui auraient pu être estampillés Symphony X. Pour mener à bien son projet, Romeo s’est entouré d’un groupe solide et expérimenté avec une section rythmique constituée de John Macaluso, qu’on ne présente plus, et John "JD" DeServio (Black Label Society) l’ami d’enfance de Romeo à la basse. Pour le chant, Romeo a déniché la voix encore peu connue de Rick Castellano mais dont on fait le pari qu'elle fera rapidement parler d’elle au vu des performances qu’il livre dans cet album.
Comme l’avoue Michael Romeo, ce disque est la pure résultante de ses affinités créatives, le metal et la symphonie. Par ses brillants développements mélodiques et son dosage subtil entre orchestrations et phrasés de guitares tranchantes, "War Of The Worlds / Pt. 1" est la démonstration ultime que Romeo est maître dans le metal épique à forte connotation cinématographique. Romeo équilibre son premier chapitre avec de purs brûlots métalliques dans lesquels riffs et refrains irrésistibles sont légion, comme dans ‘Fear Of The Unknown’, le thrash ‘Black’ à la partie instrumentale dense, le percutant ‘Oblivion’ qui terrasse tout avec ses chants entêtants et ‘Difference’ à la surprenante cassure au piano. Intercalées en bonne place, de courtes mais denses séquences très orchestrées colorent le disque d’une forte dimension épique avec ‘Introduction’ et l’instrumental ‘War Machine’ qui permet à Romeo d’exprimer ses talents de compositeur symphonique.
Les autres temps forts de l’album sont ceux dans lesquels les deux composantes principales s’entremêlent. Ils constituent le cœur de cette bande-son à la guerre des mondes et débutent par le morceau le plus audacieux écrit par Romeo dans ce disque : ‘F*cking Robots’ est une réussite dans ce mélange de textures électroniques lourdes pour coller au sujet du titre, d'orchestrations homériques et de reprise du thème mélodique vocal du titre précédent. Ce surprenant ‘F*cking Robots’ ouvre la voie à un ‘Djinn’ dévastateur qui accentue la tonalité orientale et antique (dans les chœurs) de l’œuvre avant de laisser se développer la power-ballade ‘Believe’, probablement le morceau le plus proche de Symphony X, qui met particulièrement en avant l’interprétation émotionnelle de Castellano. "War Of The Worlds / Pt. 1" se termine sur un synthétique ‘Constellations’ qui joue parfaitement son rôle de conclusion du premier épisode par les hauteurs épiques atteintes, tout en maintenant le suspens évocateur de la suite à venir.
Avec la première partie de son diptyque "War Of The Worlds", Michael Romeo reste dans la lignée de ce qu'il a composé pour Symphony X dans "Underworld", mais dans une formulation plus digeste avec des formats courts et très mélodieux sans ramifications progressives et de larges plages symphoniques pour lier le tout dans une cohérence bien menée. On attendra la seconde partie pour juger de l'ensemble de l'œuvre, mais ce premier chapitre est d'ores et déjà une réussite qui suscite l'impatience d'écouter la suite.