Voilà 7 années que la comète Phideaux, auteur d'une discographie pléthorique composée de huit albums remarquables publiés en autant d'années, s'était éloignée de la planète progressive, ne donnant des nouvelles qu'avec parcimonie et le plus souvent pour indiquer le report sine die de son retour dans nos contrées musicales.
Et après toute cette attente, voilà que nos Américains nous reviennent avec une double galette de 90 minutes, présentée comme la troisième partie du triptyque entamé avec "The Great Leap" et "Doomsday Afternoon".
Le concept, critique sévère et double des nuisances de "Big Brother" et de la crise écologique, est porté une nouvelle fois par de nombreuses allégories animalières qui raviront sans doute les anglicistes convaincus mais dérouteront quelque peu ceux pour qui la langue de la perfide Albion ne s'avère pas aussi naturelle. En revanche, ce qui va couler naturellement dans les oreilles de l'auditeur, ce sont ces mélodies somptueuses que Phideaux Xavier nous distille depuis près de 15 années, servies la plupart du temps avec des rythmiques mid-tempo, sans négliger d'en accélérer la cadence lorsque le besoin s'en fait sentir ou que certains passages épousent des contours plus pop.
Mélodies travaillées aux thèmes variés, mais aussi et surtout des accompagnements judicieux, passant d'un minimalisme quasi-acoustique ('Tumbleweed') à un symphonisme grandiloquent mais jamais pompeux ('From Hydrogen to Love') et ne négligeant pas non plus de mettre en avant quelques parties de guitare plus rugueuses. Adepte de la superposition de couches sonores et de thèmes joués en arrière-plan, Phideaux ne déroge pas de ses habitudes et si un titre pouvait résumer à lui seul tout son univers, nul doute que les 168 secondes de 'In Dissonance We Play' y parviendraient sans problème, de même que le double chant masculin/féminin, tantôt en alternance, tantôt en chœurs.
Tous les titres s'enchaînent, coulant comme un long fleuve tranquille atteignant son apogée avec l'epic 'From Hydrogen to Love' qui ravira plus d'un progueux par ses nombreux changements de thèmes et d'ambiance. Alors certes, d'aucuns trouveront bien quelques longueurs dues à une unité de ton qui ne déroge pas aux codes utilisés pour les dernières productions du groupe ainsi qu'à quelques répétitions forcées de thèmes, probablement voulues par le concept et l'histoire à dérouler. Mais une écoute attentive permet de déceler de nombreuses subtilités, rendant chaque écoute différente de la précédente, voire de débusquer un véritable hommage au Floyd tendance "Dark Side of the Moon" ('c99').
Malgré l'intervalle entre la publication de "Snowtorch" et cette nouvelle production, malgré la durée (11 ans) entre la publication du premier volet de la trilogie et cet "Infernal" conclusif, Phideaux nous revient comme si nous l'avions quitté hier. Probablement que les grincheux s'offusqueront du fait que, décidément, 'non, non, rien n'a changé'. Les autres, très certainement les plus nombreux dont votre serviteur, savoureront le fait au contraire que 'tout, tout a continué'. Quant aux nouveaux qui s'essaieraient à l'univers de l'artiste, ce dernier album leur offrira une porte d'entrée idéale.