Fondé en 2010, Downriver Dead Men Go est un groupe qui nous vient des Pays-Bas et qui avait jusqu'à présent un seul album à son actif, "Tides" paru en 2015. Il donne un successeur à celui-ci en sortant cette année "Departures", un disque dont les titres abordent tous le thème de la "perte". Avec un tel sujet central, le nom du groupe et une pochette représentant un petit oiseau mort, il y a peu de chance que l'ambiance soit à la fête.
Effectivement, la musique de Downriver Dead Men Go est un croisement de post rock et de doom, teinté de légères touches atmosphériques. Le tempo souvent très lent ne s'accélère qu'à de très rares exceptions. La rythmique est pesante, les guitares hésitent entre riffs joués dans les médiums, arpèges faméliques rappelant The Cure ('Prison Walls', 'Uncertainty', 'To Have and to Hold') ou solos déchirants s'envolant dans les aigus ('Home', 'Uncertainty'). Quant aux claviers, ils alternent nappes soyeuses et notes cristallines, imitent les traits legato de violons ('Lamentation') ou la majesté imposante de grandes orgues ('Departure'). Le chant enfin, grave et ténébreux, ressemble à la rencontre de Jim Morrison avec Kurt Cobain.
Le tout sert des mélodies extrêmement mélancoliques, voire profondément sombres. Le groupe installe une ambiance lourde et poisseuse de désespoir qui s'empare de l'auditeur sans coup férir. Les quelques tentatives de percer cette gangue de noirceur en élevant des murs de sons ou en transperçant l'air de quelques riffs métalliques font long feu avant que l'auditeur ne retourne s'engluer dans la toile d'araignée que constituent chant et tempo languides.
"Departures" dégage une atmosphère envoûtante, parfois hypnotique, les titres longs se donnant le temps de développer des thèmes séduisants tout en prenant le soin de jouer sur les nuances et les sonorités. Néanmoins, l'album n'échappe pas complètement au défaut inhérent au post rock : les titres se ressemblent un peu tous et il est difficile d'en extraire un du lot (si ce n'est le superbe 'Departure' où la présence de Steen Gees Christensen au chant et au duduk introduit une délicieuse note exotique), induisant une relative monotonie. L'album, long, risque donc de s'avérer un peu indigeste à qui voudra l'écouter d'une traite.
En dehors de cette réserve, il faut saluer le beau travail réalisé par Downriver Dead Men Go. "Departures" se révèle fort agréable à écouter, offrant son quota de frissons, mais son atmosphère désespérée reste déconseillée à toute personne ayant des tendances suicidaires.