La même année où la France basculait dans la tontonmania, la musique d'un quatuor au look affirmé, baptisé Depeche Mode en hommage à la revue du même nom, déboule dans nos oreilles avec une pop electro s'inscrivant dans la mouvance des OMD, Ultravox et autres Human League.
A l'exception de deux titres écrits par Martin Gore, l'essentiel de "Speak & Spell" est composé par Vince Clarke, pour ce qui sera au final son album avec le groupe (mais ceci est une autre histoire). Publiée peu de temps après trois premiers singles (que l'on retrouvera sur diverses rééditions), cette première production long format contient onze titres entièrement basés sur des claviers et programmations, desquels émerge parfois péniblement, la faute à un mixage et une production quelque peu bruts, la voix pas encore très affirmée de Dave Gahan.
Néanmoins, au-delà des nouveaux singles à succès qui en seront tirés, dont le tubesque 'Just Can't Get Enough', "Speak & Spell" nous propose des titres accrocheurs en diable, aux paroles légères et dont les mélodies percutent immédiatement, avec un (bon gros) zeste de gimmicks répétitifs histoire de les ancrer durablement dans le cortex de l'auditeur. 'Photographic', 'Nodisco' ou encore 'New Life' sont ainsi emblématiques de la capacité du groupe à trouver la mélodie qui fait mouche, la rythmique à la fois mécanique et entraînante, bref, tout ce qui fait le charme d'une pop bien sous tous rapports.
Dans un registre moins expérimental que ne pouvait l'être OMD, mais toujours avec ce souci de proposer une musique ultra-accessible tout en intégrant quelques influences prestigieuses (Kraftwerk apparaît là encore comme une évidence), Depeche Mode se place immédiatement en tête de gondole des formations phares des années 80. Même si sa production apparaît aujourd'hui désuète, pour ne pas dire dépassée, même s'il n'est pas exempt de défauts, notamment dans la justesse de son chant, "Speak & Spell" reste un album fort honorable que l'on réécoute toujours avec autant de plaisir.