Avec leur premier album "Burdened Hands", les américains d'Eyestrings avaient constitué l'une des plus belles révélations de l'année 2004. Un peu de noirceur directement héritée de King Crimson et Discipline mélée à un progressif typiquement US lorgnant sur la pop à la façon de Spock's Beard ou Echolyn avait donné lieu à un album un tantinet fourre-tout mais parfaitement réjouissant. "Consumption" sorti à peine plus d'un an après est-il l'album de la confirmation attendue ?
La maturité est là sans aucun doute car, parmi les deux tendances précédemment citées, Eyestrings a choisi son camp et la bande à Parmenter a choisi de développer son côté obscur, très obscur, beaucoup trop même. Après de très nombreuses écoutes, on ne peut que se demander dans quel état d'esprit l'auditeur doit se trouver pour pleinement apprécier ce nouvel opus. Tout ce qui pourrait le faire accrocher semble dilué dans une langueur et un pessimisme qui prendront toujours le pas sur des mélodies souvent réussies, ce qui donne une impression de monotonie concernant cet album pourtant assez varié.
Les morceaux les plus calmes "Stagnant" et "Slate Clean" sont les plus accessibles et les plus mélodiques. Ils font d'ailleurs suite aux deux morceaux les plus torturés.
"Valid for a week" met beaucoup de temps à dévoiler ses charmes mais s'avère très réussi condensant en un seul morceau toutes les références citées au début de cette chronique. On y ressent une urgence qui rend le morceau particulièrement poignant. En revanche, "Code of Tripe" est un morceau extrêmement difficile à appréhender. On sent pourtant que Parmenter et Kennedy y ont mis toutes leurs tripes, leur rage mais cette fois-ci musicalement ça ne passe pas.
"Groove Seven" est un instrumental qui passe plutôt bien mais qui ne semble pas forcément indispensable à la cohérence de l'album. Lorsque commencent les 20 minutes de "Lifelines", la crainte de l'overdose se transforme en soulagement à l'écoute de ce morceau, véritable petit bijou. Ne vous y trompez pas, "Lifelines" reste sombre mais cette fois-ci les mélodies mélancoliques font mouche.
Rassurons les lecteurs, même si ce morceau ne prend sa force qu'après des écoutes répétées, "Intervention" et "Traces" fonctionnent quant à eux dès la première fois en particulier grâce au piano et au chant de Ryan Parmenter qui sait se faire fragile.
Avec ce "Consumption", Eyestrings n'a pas choisi la facilité et déroutera bon nombre des amateurs de son premier opus. Ceux-ci ne devront pas se décourager et, même s'ils ne sont pas amateurs de KC ou Discipline (comme votre serviteur), les amateurs de rock progressif aventureux mais mélodique (ce n'est pas Thinking Plague quand même) finiront vraisemblablement par être séduits par cet album dont ils n'extraieront que peu à peu la substantifique moëlle.