Unanimated est un groupe suédois de vieux routards du death, créé à la naissance du genre, lorsqu'il avait le vent en poupe, lorsque Benediction, Dismember, Carcass arpentaient les salles obscures et déversaient leur fiel. La formation a sorti quelques albums, puis a éclaté en vol pour ressusciter douze années plus tard avec un line-up recomposé. Après cette absence, le combo a proposé des albums de qualité, à la frontière du death et du black, sombres donc, violents aussi et toujours angoissants. La formation éclaire aussi ses galettes d’instants brumeux, de césures multiples et de passages presque “apaisés” desquels naissent des mélodies chaudes ou plus glacées. Ainsi même au milieu de guitares étouffantes, de batteries marteau-pilon et après la mise à sac des structures de compositions conventionnelles, surgit de ce magma brûlant le souvenir vaporeux de mélodies attachantes, comme finalement le triomphe du beau sur l’immonde et l’indicible.
Le point d’ancrage de l’ouvrage est donc la mélodie, soille froide, désespérée, malsaine ou simplement touchante. Ainsi avec ‘Of Fire And Obliteration’, les sens sont subjugués par des arpèges sereins, puis sagement conduits vers des pays de cocagne d’où s’échappent des cauchemars macabres. Un chant désincarné retentit et laisse planer l’ombre tentaculaire de Dissection. Les racines sombres se dévoilent petit à petit lorsque la six-cordes égrène des trilles qui bâtissent une mélodie tourmentée. Alors les cavalcades erratiques, les mélodies étranges et les passages introspectifs s’unissent en une ronde perpétuelle. La recherche harmonique est un aspect central des compositions plus black telles que ‘Annihilation’. Au milieu de riffs puissants ou de guitares moites, la mélodie naît et jaillit d’un chaos tourmenté, de variations rythmiques harassantes, aidée par les imprécations d'une voix aigrelette.
Mais la mélodie ne peut exister sans la puissance brute et l’énergie. Cette rencontre entre puissance et mélodie engendre inévitablement une grande chaleur : lorsque ‘Adversarial Fire’ entame l’opus en trombe et qu’un cri retentit sur fond de riffs gluants, l’énergie est peut-être à son apogée. Cette première ruée affirme que le groupe veut en découdre avec des métriques précises, voire millimétrées, dignes d'Arch Enemy. Le titre file à la vitesse de l’éclair, assène des coups de boutoir comme pour mieux faire pénétrer ses blasphèmes dans le crâne du plus grand nombre. Enfin ‘From A Throne Below’ évacue à nouveau une énergie folle. A peine les cris résonnent-ils, à peine les premiers riffs sont-ils jetés en pâture à l’auditeur que la galette le glace d’effroi et que cette puissance résonne et résonnera tout au long des quatre pistes de l’opus.
Energie et puissance sont donc les maîtres mots d' “Annihilation” : énergie sombre et épaisse, puissance brute et parfois brutale, mélodies déstabilisantes et tranchantes. Ces éléments en se rencontrant donnent naissance à une lumière blafarde, mortifère et aveuglante qui habille l'opus d'un voile de mystère et de classe. Même après des années de silence, Unanimated livre une rondelle courte peut-être, mais hypnotisante et pleine d'une rigueur qui augure d’un avenir radieux pour ce mastodonte échappé d’outre-tombe.